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production des pierres de couleur, ne paraît pas continuer à fournir le péridot, qui du reste n’est pas rare dans les laves des volcans, quand on se contente de recueillir de petits cristaux minéralogiques tout à fait au-dessous de ce que l’art du lapidaire peut mettre en œuvre. À ce propos, je dirai qu’autrefois j’ai rencontré souvent chez les minéralogistes un amateur de petits cristaux, qui en avait fait à peu de frais une assez riche collection. Vus à la lampe et au microscope, les petits échantillons ainsi réunis vérifiaient toutes les lois cristallographiques d’Haüy. Un cristal qu’une fourmi eût pu traîner était pour cet amateur excentrique ce que l’Etoile du sud sera pour les admirateurs ordinaires de diamans. Il était le fléau des marchands par ses longues et minutieuses investigations. D’une roche parsemée de petits cristaux il en tirait qui, sous le microscope et convenablement éclairés, donnaient de bonnes indications scientifiques.

Le péridot a l’insigne honneur d’être la seule gemme qui se soit trouvée jusqu’ici dans les pierres qui tombent du ciel. A la vérité, ces petites olivines ne se vendraient pas au carat; mais en les faisant tailler dans leur gangue, on aurait une pierre, sinon brillante, du moins fort curieuse. L’amateur de cristaux microscopiques dont j’ai parlé tout à l’heure avait une belle petite olivine tombée du ciel, et c’est même cette circonstance qui l’a rappelé à mon souvenir. Je n’ai pas besoin de dire que l’existence d’une pierre cristallisée dans les masses qui tombent de l’atmosphère réfute victorieusement toutes les idées de ceux qui croient que les météorites se forment subitement dans l’air par une prétendue condensation d’exhalaisons terrestres. Alors, comment le péridot eût-il pu s’y cristalliser ? car la disposition régulière des particules qui constituent un cristal exige un temps immense. Ceux qui font croître des cristaux dans des dissolutions très chargées mettent en ligne de compte pour la nourriture de leurs cristaux et le temps et la patience.

Du péridot nous passons au grenat, qui est une pierre ferrugineuse d’un rouge foncé et manquant la plupart du temps de transparence; il s’en trouve néanmoins quelques-uns qui font exception et qui sont d’une couleur très belle, dite fleur de pêcher. J’en avais choisi quelques-uns avec un amateur de gemmes doué d’un tact exquis, M. le marquis de Drée. A la perfection de la couleur il exigeait qu’une pierre d’échantillon joignît une teinte de même force en tout sens, ce qui, manquant à bien des pierres taillées au hasard dans le cristal minéralogique, constitue des défauts bien sensibles à un œil exercé ou prévenu. On fait avec le grenat taillé très petit des assemblages de pierres juxtaposées qui ont un aspect agréable de rouge mêlé de noir. Le seul grenat qui ait une valeur un peu élevée quand il est de belle qualité, c’est l’hyacinthe, pierre d’un jaune orangé