Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 9.djvu/1084

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’espèce minéralogique à laquelle appartient le saphir s’appelle corindon. Après le corindon rouge ou rubis oriental vient le corindon bleu ou saphir oriental. Parfois le corindon est coloré en jaune très beau, alors il prend le nom de topaze orientale; s’il est violet, ce qui est rare, il est dit améthyste orientale; enfin il est quelquefois blanc ou incolore, comme le pur cristal de roche. Alors il ressemble un peu au diamant, et pourrait être confondu avec lui, si l’on n’avait pas pour les distinguer le poids plus grand du saphir blanc et sa réfraction, qui est double et qui montre au travers de la pierre deux aiguilles au lieu d’une.

On découvre au microscope, dans certains saphirs généralement un peu pâles, des traits dirigés dans le sens des faces des prismes à six pans. La lumière, se reflétant sur ces filamens intérieurs qui ont trois directions différentes, produit trois petites traînées brillantes transversalement à ces filamens et aux faces du prisme. L’entre-croisement de ces trois petites traînées lumineuses forme une étoile à six beaux rayons qui vaut à la pierre le nom de saphir astérie, c’est-à-dire saphir étoilé. Ces saphirs sont fort estimés des Orientaux, surtout quand l’astérie se forme dans un saphir d’un bleu foncé. Les corindons de toutes les couleurs sont susceptibles d’être astéries. Dans ses voyages en Afrique, M. d’Abbadie portait une astérie bleue assez belle qui lui commandait souvent le respect des indigènes. On a des astéries sur un fond rouge, bleu ou jaune, suivant la couleur du corindon. Jusqu’ici on n’en a pas vu sur le corindon blanc. Je viens de dire que ce reflet étoile provenait de petits filets contenus dans les pierres. Ces filets sont le résultat soit de matières étrangères, soit de petits vides laissés dans la disposition régulière des particules au moment de la cristallisation. Si, au lieu d’essayer d’avoir des astéries par reflet, on taille la pierre de manière à regarder au travers, alors le phénomène de l’astérie devient presque universel. A moins que la pierre ne soit d’une parfaite uniformité cristalline, l’observateur qui prend pour point de mire une bougie placée à une distance moyenne aperçoit de ces traînées lumineuses transversalement à toutes les séries de filamens que contient le minéral. Suivant que la pierre provient d’une figure à quatre ou à six pans, ou a une astérie à quatre ou à six rayons, et s’il n’y a des filamens que dans une direction, il n’y a qu’une bande lumineuse. J’ai fait tailler ainsi toutes les gemmes et un grand nombre de cristaux minéralogiques. En rayant artificiellement à la pointe de diamant une plaque de verre suivant divers sens, on y détermine des bandes de lumière en même nombre que les séries de traits entaillés sur la surface, et toujours dans une direction transversale à ces traits. On peut même très simplement avoir une astérie carrée, en étendant avec le doigt un peu de cire ou de substance