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pierres dures gravées soit en relief, soit en creux, et leurs artistes nous ont laissé dans ce genre les plus admirables travaux que l’art et l’imagination puissent concevoir. Ici, comme dans la sculpture, les modernes n’ont point dépassé et n’ont pas même atteint la perfection des œuvres de l’antiquité. Les pierres gravées qui servaient alors de cachet, et qui nous ont été conservées, sont des objets d’art du plus haut prix ; en même temps elles nous donnent des notions minéralogiques importantes sur les diverses pierres fines que connaissaient les anciens.

Les pierres de couleur ne paraissent pas aujourd’hui représenter plus du dixième de la valeur totale des gemmes. Ainsi les diamans entrent dans le capital total au moins à raison de 90 pour 100. Chez les anciens, c’était le contraire, car alors on peut dire que le diamant n’existait guère comme pierre d’ornement, puisqu’il n’était pas taillé de manière à montrer les vives couleurs qui le placent aujourd’hui au premier rang des pierres précieuses. De plus, les anciens vivaient bien plus au jour que nous. C’est à la lumière du ciel que la richesse des couleurs minérales peut être appréciée complètement. Notre système d’illumination nocturne par les lampes, les bougies, le gaz ou même l’électricité, verse sur tous les objets des teintes souvent peu favorables aux couleurs naturelles des gemmes. C’est ainsi que le saphir, le grenat, l’astérie, la turquoise osseuse, le spinelle bleu, l’améthyste, et même l’opale pour quelques-uns de ses reflets, perdent beaucoup aux lumières. L’expérience est surtout frappante lorsqu’on plonge une pierre de couleur dans le spectre irisé que le prisme forme avec les rayons du soleil. Alors on voit la couleur de la pierre varier avec la nature de la portion du spectre qui l’illumine successivement, et si l’on tient à la main deux pierres de même teinte, mais d’une nature différente, elles se comportent différemment dans la même sorte de lumière. Souvent un strass coloré, misa côté d’une pierre fine, trahit ainsi son peu de valeur. Il est une autre épreuve plus facile à faire : elle consiste à regarder la pierre colorée au travers d’un verre coloré lui-même en rouge, en jaune, en vert ou en bleu. Chaque pierre répond d’une manière différente à cette épreuve, et donne ainsi des caractères propres à en reconnaître la nature.

Puisqu’il a été ici question de strass, c’est-à-dire d’une composition vitreuse imitant le diamant et les autres pierres précieuses, je dirai qu’il résulte de renseignemens nombreux que, malgré le haut prix des pierres fines, il y a beaucoup moins de faux dans les parures qu’on ne serait tenté de le croire au premier abord. Les strass, colorés ou non, sont des verres fort tendres surchargés de plomb et d’émail, et analogues à ce qu’on appelle des cristaux dans les services de table. Dans les premiers temps de la substitution des strass aux pierres fines, le bas prix comparatif de ces verres fit passer sur