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intérieures et le rétablissement du commerce libre sera un des moyens les plus puissans de guérir les profondes blessures que la guerre civile a faites à une grande partie du territoire de l’empire. » En conséquence, la ligne douanière entre l’Autriche et la Hongrie est effacée, ainsi que les taxes perçues à l’intérieur sur les routes et ponts. Exception est faite seulement pour les marchandises sur lesquelles l’état se réserve un monopole, comme le sel et le tabac; encore n’est-ce là qu’une mesure transitoire, « attendu qu’on se propose d’effacer au plus tôt jusqu’aux dernières traces des droits qui semblent mettre obstacle au libre échange dans toute l’étendue du territoire commun. » Cette réforme inflige au trésor impérial un sacrifice de 3 millions et demi de florins (9,135,000 fr.), mais on se flatte que la perte sera bientôt compensée par la diminution des frais de surveillance et par l’accroissement progressif du commerce.

Survient enfin l’ordonnance du 31 décembre 1851, qui, revenant sur les concessions politiques de 1849, enlève aux nationalités l’ombre d’indépendance qu’on leur avait laissée. « A l’avenir, dit-on, on suivra la voie de l’expérience. » Ce qui signifie, en langue vulgaire, qu’on restaure le pouvoir absolu; mais comme on voit dans l’assimilation des peuples, dans l’unité de l’empire, le gage de la prospérité future, on confirme solennellement « l’égalité de tous les sujets devant la loi, » de même que la suppression des corvées et des dîmes. On essaie en même temps de donner une valeur effective à cette vague promesse d’indemnité faite en vue de l’aristocratie hongroise, trop vivace encore pour qu’on ne s’applique pas à la ménager. Il est décrété que le paysan sera astreint à payer au seigneur les deux tiers de la somme équivalente au capital de la redevance féodale, et qu’à ce prix il deviendra propriétaire libre des portions de terrain qu’il aura successivement rachetées. Pour hâter la libération si désirable du sol productif, le gouvernement central promet d’avancer aux cultivateurs la moitié de la somme qu’ils ont à fournir. Afin que le sujet affranchi acquière en même temps que la propriété la garantie de l’égalité devant la loi, on abolit les juridictions seigneuriales, qui sont remplacées par les tribunaux de l’état; on avise aussi aux moyens de constituer des communes rurales, et de confondre dans les municipalités les détenteurs du sol, nouveaux ou anciens. On affecte de témoigner quelque condescendance à l’aristocratie, en lui accordant des distinctions honorifiques, des moyens d’influence locale proportionnés à la richesse territoriale de chacun. Néanmoins, sous l’entraînement du principe d’égalité, on porte à la féodalité magyare le dernier coup par deux ordonnances de 1852 : l’une du 27 mai, qui introduit dans les provinces hongroises le code pénal composé en 1803 et remanié en 1848 sous l’inspiration des idées