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fromages ; la Bohême, ses laines, qui rivalisent avec celles de Saxe, et ses sucres de betterave, qui rivalisent avec les nôtres. Ces échantillons donnent une haute idée de l’état de l’agriculture dans ces contrées.

Déduction faite de la Lombardie, le reste de l’Italie vient, avec la France, au troisième rang. Sur quelques points de la presqu’île, comme la Rivière de Gênes et le duché de Lucques, la culture a atteint un haut degré de perfection ; sur d’autres, comme la Sardaigne et la Sicile, elle languit misérablement. Somme toute, le développement agricole moyen doit être le même que chez nous, et la population spécifique est plus nombreuse. C’est ce qui reste à l’Italie de son ancienne splendeur. Sans l’académie des géorgophiles de Florence, qui nous a donné une collection complète des produits toscans, l’agriculture italienne serait absente de l’exposition ; son état présent n’est pourtant pas à dédaigner, et quand elle n’aurait rien de nouveau à nous apprendre, le nom de l’Italie ne doit jamais manquer, quand il s’agit d’une revue des œuvres de la civilisation. Il n’y a pas déjà si longtemps que l’agriculture italienne était la première de l’Europe. Châteauvieux et Sismondi en ont parlé dans les termes les plus enthousiastes. Le portrait tracé par Sismondi était embelli, nous le savons maintenant ; il avait pris un seul point, le val de Nievole, comme type de toute une contrée, et sa passion contre le système de fermage à prix d’argent, qui prévalait en Angleterre, lui a caché les inconvéniens du métayage usité en Toscane. Les publications de MM. Ridolfi, dans les actes des géorgophiles, ne laissent plus aucun doute sur ces erreurs. Il n’en reste pas moins beaucoup de vrai dans ce qu’il a écrit, et si l’adoption de l’assolement quadriennal, le développement de la mécanique, de la chimie et des autres sciences appliquées à la culture, l’accumulation des capitaux, ont fini par élever l’agriculture anglaise à une plus grande hauteur, si la France a fait en trente ans de paix et de liberté des progrès qui ont comblé l’intervalle, il n’en est pas moins certain que l’Italie a eu les devans, non-seulement aux XVe et XVIe siècles, mais dans des temps plus rapprochés. N’oublions pas que la Lombardie, bien que détachée par la conquête, fait naturellement partie de la péninsule.

La France et l’Italie terminent la série des pays passablement cultivés, et comme tout n’y est pas également en valeur, on peut estimer à 40 millions d’hectares le contingent qu’elles apportent à elles deux, de sorte qu’il n’y a dans toute l’Europe que 100 millions d’hectares qui produisent à peu près ce qu’ils peuvent produire dans l’état actuel des connaissances agricoles.

On peut diviser le reste en deux nouveaux groupes qui deviendraient alors le quatrième et le cinquième dans l’ordre décroissant.