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dits sont des corps élémentaires. Quant à leurs propriétés chimiques, on ne peut guère ici les exposer avec détail; elles sont assez complexes, et il faudrait, pour les faire connaître, écrire un traité complet, ou se résoudre à n’être compris que par des chimistes, auxquels on n’apprendrait tout au plus qu’une chose nouvelle, chose qu’ils n’ont nulle envie de savoir : c’est que leur science admirable renferme bien des lacunes, et sûrement bien des erreurs. On sera donc obligé de nous croire un peu sur parole lorsque nous dirons que les propriétés chimiques des métaux diffèrent peu de celles des autres corps simples, et qu’une définition par la chimie serait à peu près aussi vague que celle que pourrait donner la physique. L’argent ne se sépare du soufre par aucun trait saillant, et ceux qui ont voulu fonder une classification sur les décompositions des sels par la pile ne sont pas arrivés à des résultats certains et satisfaisans. Ce sont là des barrières établies à grand’peine, et que chaque découverte nouvelle tend à renverser. Le chimiste même qui a perfectionné la fabrication de l’aluminium a troublé cette classification en proposant très judicieusement de rapprocher des métaux un corps que l’on en séparait jusqu’ici, le silicium. Ni la chimie, ni la physique, ni le sens commun ne fournissent donc une bonne définition des métaux, et l’on, ne découvre ni a priori, ni en feuilletant les ouvrages scientifiques, quelle est cette distinction, que chacun croit si naturelle, qui sépare une substance métallique d’un autre corps simple. D’où vient pourtant que ces barrières ont été élevées et qu’elles subsistent encore? C’est là ce qu’il convient d’exposer, et nous serons rapidement conduit aux causes de la découverte de l’aluminium, à sa préparation et au trouble que ses propriétés mieux connues doivent apporter dans la chimie telle que nous l’avons conçue jusqu’à présent.

Dans les temps anciens, personne n’a eu l’idée de se faire la question que nous nous sommes posée, et l’on connaissait un assez grand nombre de métaux sans se demander de quelle nature étaient ces substances que l’on confondait sous un même nom. On ne cherchait pas s’il fallait les réunir aux quatre élémens, la terre, l’eau, l’air et le feu, ou si c’étaient des matières composées. Pour les anciens, un métal était une substance facile à connaître et à décrire, car une bonne partie des métaux que nous employons aujourd’hui étaient inconnus et restaient dans le sein de la terre combinés à des substances qui les rendaient méconnaissables. On n’employait guère que l’or, l’argent, le cuivre et peut-être l’étain; le fer même n’est entré dans l’usage général que fort tard. Toutes ces substances avaient ce qu’on appelle communément l’aspect métallique bien caractérisé; elles étaient solides, dures et brillantes; aussi ne pouvait-on s’y tromper. On sait d’ailleurs que l’antiquité ignorait la chimie, et que sous ce rapport les Arabes sont nos maîtres. C’est au moment de leur plus