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voulons parler d’une substance dont le nom commence à être bien connu, et qui est au moment de passer du laboratoire des savans dans l’industrie : c’est ce métal nouveau qui fait grand bruit depuis un an, l’aluminium.

Lorsqu’on a traversé le couloir qui mène du bâtiment principal du palais de l’exposition dans la galerie des machines, on entre dans une sorte de rotonde qui présente un assez beau coup d’œil, et qui peut soutenir la comparaison avec quelques-unes des salles du Palais de Cristal, que nous avons tenté d’égaler. Là se trouvent en effet les deux expositions des industries ou plutôt des arts dans lesquels nous excellons, — l’industrie des porcelaines et celle des tapis, ou d’une façon plus restreinte encore, car là est notre véritable supériorité, les porcelaines de Sèvres et les tapisseries des Gobelins, de Beauvais et de Mines. A droite en entrant, sur une petite table couverte de velours, et qui paraît quelque peu mesquine auprès de tant de magnificences, sont placées deux piles formées chacune de sept ou huit lingots de 0m,1 environ de longueur et de m,02 d’épaisseur. Ces lingots se ressemblent tous; ils sont d’un gris argenté, un peu ternes à la surface, mais la cassure en est brillante. Les uns sont assez lourds, les autres sont d’une légèreté extrême. Au-dessous d’une des piles est écrit le mot argent, au-dessous de l’autre le mot aluminium. C’est en effet là cette substance qui au premier abord ne présente rien d’extraordinaire, et qui a pourtant le pouvoir d’arrêter les visiteurs presque autant que les vases de Sèvres ou le surtout de cuivre argenté de M. Christofle, tant ce nom a été souvent répété depuis un an. Chacun regarde cette modeste pile avec curiosité, et presque tout le monde, après en avoir lu le nom, se souvenant que c’est un métal nouveau, demande aussitôt : « Quelle en est la composition? Le trouve-t-on tout formé dans la terre?» C’est donc à ces deux questions un peu naïves que je dois tout d’abord répondre. Il suffira de rappeler qu’un métal n’est composé que de lui-même, qu’un métal est un corps simple pour parler plus scientifiquement, qu’ainsi il existe nécessairement tout formé dans la terre, et qu’on ne peut trouver épars les élémens qui le constituent. Il peut se combiner à d’autres substances, mais il ne peut être décomposé. Après avoir établi ces divers points, nous aurons à voir quels sont les avantages de ce nouveau métal, les procédés que l’on emploie pour l’obtenir pur, et enfin à quels usages on peut l’employer.

Tout le monde sait ou croit savoir ce qu’on entend par un métal. Ce mot existe dès la plus haute antiquité, et il paraît toujours avoir été compris et entendu de même. Montrez à qui vous voudrez un morceau de fer ou de cuivre, et chacun vous dira : voilà un métal.