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Godemard et Meynier, pour les satins de couleur Heckel, pour les satins noirs Bellon, pour les étoffes à gilets Fontaine et Balleydier, pour les ornemens d’église Le mire et Yemenitz, pour les ameublemens Grand frères, pour les crêpes et foulards de soie Durand, pour les robes Croizat, pour les velours de couleur Blache, puis en d’autres genres, Gindre, Potton, Mathevon et Bouvard? Telle est la part de Lyon; celle de Saint-Étienne n’est pas moindre. Ce sont, pour les rubans de nouveauté, MM. Crepet et Granger, Barlet et Belingard, Collard et Comte, et dans les rubans courans, Barlet et compagnie, Colcombet et Grangier de Saint-Chamond. Encore n’est-ce là qu’une faible part de ce qui mériterait une mention. Lyon est un être collectif dont on ne peut sans inconvénient briser et décomposer l’ensemble. Il y a pourtant dans son exposition une exposition à part, des plus modestes en apparence, et à côté de laquelle les curieux passent sans s’y arrêter : c’est celle des peluches de Tarare. Naguère la Prusse rhénane régnait sans partage dans cet article, important à coup sûr, puisqu’il défraie, pour la plus grande part, la fabrication des chapeaux d’hommes. Crefeld et Elberfeld en fournissaient au monde entier, même à la France. Pour lui enlever ce privilège, il a fallu beaucoup d’essais, beaucoup de tâtonnemens. La Moselle a lutté d’abord, et non sans succès, avec des ateliers disséminés dans la campagne; mais l’honneur de vaincre et de faire capituler les fabriques du Rhin devait revenir à Tarare et au magnifique établissement qu’y ont fondé MM. J.-B. et P. Martin et Casimir. Deux perfectionnemens ont suffi pour nous rendre l’empire, — la supériorité du noir et le métier à double pièce, qui a diminué de moitié le prix de la main-d’œuvre. Aujourd’hui non-seulement la France reste maîtresse sur son terrain, mais elle domine au dehors, et fournit des peluches à la Prusse elle-même. La Moselle a conservé ses cliens, et Tarare est sans rivale sur les marchés de l’Angleterre et de l’Amérique du Nord; toutes les chapelleries connaissent et recherchent ses produits. Son seul établissement livre à l’exportation une valeur de 6 millions de francs.

Quand on parle d’industries de luxe, il serait injuste et ingrat d’oublier Paris. Si Lyon est le foyer de la soierie, Paris en est l’arbitre; ce que Lyon exécute, c’est Paris qui le conseille et le règle; le sentiment du goût en émane et y aboutit. Paris d’ailleurs a, sans le tissage des soies, des fabrications qui lui sont propres, et que Lyon ne surpasse pas. Tels sont les articles où la soie grège entre comme principal élément, et dont on remarque à l’exposition des échantillons si distingués. Il est impossible de passer, sans être émerveillé, devant ces magnifiques impressions où la perfection du tissage fait disparaître jusqu’à l’entrelacement des fils, et que relèvent à la fois