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en 1848 une altération profonde, la transformation rapide en une masse fongueuse à odeur nauséabonde des pains de la garnison de Paris, — que ces spores ou propagules de la végétation parasite conservent leur propriété germinative à la température de 100 degrés, et ne la perdent que vers 140 degrés centésimaux.

Il y a donc évidemment des germes doués d’une énergie assez grande pour résister à la température où se forme la mie de pain et conserver dans ces circonstances leur faculté germinative avec leurs propriétés délétères. On ne saurait, affirmer qu’il n’en serait pas de même de quelques virus dangereux; il est d’ailleurs si facile de s’en garantir en faisant adopter les moyens mécaniques salubres, que l’on ne doit pas désespérer d’obtenir dans l’intérêt général l’assentiment et l’appui des consommateurs pour de telles améliorations. Les boulangers y seraient eux-mêmes intéressés, et un grand nombre déjà l’ont compris, car le pétrissage mécanique, qui n’exige qu’une surveillance facile, les mettrait à l’abri des exigences et même des coalitions dont ils ont eu parfois à souffrir de la part des hommes du métier.

On compléterait les améliorations désirables de la boulangerie par l’usage, qui commence à se répandre, des fours à sole tournante ou fixe, dont on voit plusieurs modèles à l’exposition. Ces nouveaux fours, chauffés à l’aide d’un foyer spécial, évitent l’emploi du combustible sur la sole même où les pains doivent être placés. On supprime ainsi dans l’intervalle de temps compris entre chaque fournée les nettoyages de l’âtre, presque toujours incomplets, très pénibles pour les ouvriers, laissant en général un peu de cendres et des débris charbonneux qui salissent le dessous des pains. Un avantage plus important des fours à foyer séparé, c’est que les ouvriers n’ont plus à retirer de l’âtre la masse de braise incandescente dont le rayonnement fatigue, affecte la vue et échauffe si fortement toute la partie antérieure des bras et du corps.

La fabrication du pain dans de grandes boulangeries est au nombre des perfectionnemens tour à tour proposés, contestés, et cependant mis en pratique à diverses époques en France et en Angleterre. J’ai vu à Londres un établissement de ce genre bien installé, tenu avec soin; mais il ne m’a pas semblé réunir de meilleures conditions de succès que les grandes boulangeries fondées antérieurement auprès de Paris. Cependant, en Angleterre, la position des boulangers est toute différente de ce qu’elle est en France, la fabrication y est tout autre aussi : la profession y est libre, le prix du pain n’est soumis à aucune taxe. Malgré la concurrence des établissemens éloignés du centre, les boulangers de la ville s’entendent assez bien pour maintenir le cours à un taux qui leur laisse plus de bénéfice que n’en peuvent réaliser les boulangeries taxées en France, et qui fait