Page:Revue des Deux Mondes - 1855 - tome 12.djvu/1305

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’analogue, et n’est guère qu’une bonne copie d’un modèle connu. Voici enfin M. Stephenson, le vétéran de la vapeur, et qui en résume les traditions : personne n’est resté plus conforme à lui-même et n’a gardé avec plus de soin un héritage de famille. C’est toujours la locomotive paternelle, telle qu’on la voit sur nos plus anciens chemins de fer, avec les roues motrices au milieu, les cylindres et le mouvement à l’intérieur. Quelques perfectionnemens de détail se font remarquer ; mais c’est déjà un titre suffisant pour une locomotive que de porter le grand nom de Stephenson. Il en est de même de celle de M. Fairbairn. Sa plus sûre recommandation est dans sa signature.

En somme, l’exposition des machines appliquées à la locomotion n’a pas tenu toutes ses promesses, et de la part d’une industrie aussi importante, on pouvait espérer des efforts plus sérieux. Non-seulement il n’y a lieu de signaler aucune découverte capitale, rien de ce qui laisse une trace durable dans l’histoire de la science et de l’art, mais le champ plus modeste des améliorations n’a pas même été agrandi d’une manière sensible. Point de témoignage qu’un public alarmé puisse regarder comme allant à son adresse, ni frein plus puissant, ni action plus énergique donnée au renversement de la vapeur, pas même un modèle de l’ingénieux appareil de M. Bonnelli, qui établit des signaux d’appel d’une locomotive à l’autre. Il y a eu, sur toutes ces mesures de sauvegarde, un oubli universel et une sorte de prétention. Probablement c’est là ce qui préoccupait le moins les constructeurs de machines et les ingénieurs sous la main desquels ils se trouvent. Il y a lieu d’espérer que cette incurie cessera : on voit à quelles catastrophes elle aboutit. Que l’on cherche, dans l’intérêt des entreprises, à accroître la force utile et à diminuer la force perdue ; qu’on multiplie les combinaisons pour ménager le combustible et tirer de la vapeur un parti plus grand ; qu’il y ait des bittes d’école pour décider quelle sera la place des cylindres, soit en dedans, soit en dehors du châssis, et ce qu’il faut préférer des machines lourdes ou des machines légères ; qu’on pèse les avantages de l’emploi de l’acier forgé substitué au fer, au moins pour les pièces les plus importantes ; qu’on ait l’esprit ouvert et la main prompte pour tout ce qui peut ajouter aux bénéfices de l’exploitation, élever les dividendes et donner aux actions une bonne allure sur le marché des fonds publics, rien de mieux : il n’est interdit à personne, encore moins aux administrateurs des compagnies responsables vis-à-vis de leurs commettais, de songer à la fortune d’une entreprise ; mais à côté de ce devoir et de ce soin il en est d’autres plus sacrés. Les compagnies ne sont pas seulement un instrument de spéculation ; elles ont un rôle plus digne, et n’en déclinent