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la simplicité frappera tout le monde. On jette dans un vase plein de glace un kilogramme de fer, ou de cuivre, ou d’eau, primitivement porté à la température de 100 degrés ; il se refroidit jusqu’à zéro, abandonne la chaleur qu’il avait accumulée en s’échauffant, et fond une portion de glace que l’on pèse et que l’on trouve différente avec chacune des substances employées. Plus ces substances ont fondu de glace, plus elles contenaient de chaleur ; leur capacité calorifique est donc mesurée aisément par un phénomène aussi simple que facile à observer.

Avant Dulong et Petit, les capacités calorifiques avaient été comparées par des méthodes nombreuses, mais qui n’avaient point alors le degré d’exactitude qu’elles pouvaient acquérir. Ils acceptent l’une d’elles, la perfectionnent, et parviennent à déterminer avec précision les capacités d’un nombre considérable de corps ; ils connaissent ainsi ce qu’il faut dépenser de chaleur pour échauffer un, ou deux, ou trois kilogrammes d’une espèce quelconque de matière ; mais ils veulent aller plus loin : ils se proposent de trouver la capacité calorifique des atomes des corps, ou de comparer les quantités de chaleur absorbées par les molécules des diverses espèces de substances, quand elles s’échauffent également. Ce problème, en apparence insoluble, est en réalité bien facile, quand on sait ce que nous entendons par atomes et quel est le poids relatif de chacun d’eux.

Sans se préoccuper des discussions stériles qui avaient séparé les philosophes sur la manière dont on devait comprendre la divisibilité de la matière, sans penser même que cette question fût dans son domaine, la chimie avait été, par le progrès naturel de ses découvertes, insensiblement conduite à la résoudre, et de la manière la plus heureuse : elle avait attentivement suivi les circonstances qui accompagnent les combinaisons des corps et raisonné, comme nous allons le faire, en prenant pour exemple un cas particulier. L’oxygène et l’hydrogène peuvent être mêlés l’un à l’autre dans un vase, et se maintenir, aussi longtemps qu’on le désire, dans un état de voisinage intime sans perdre aucune des propriétés qui les distinguent quand ils sont séparés, sans donner lieu à aucune réaction, a aucun phénomène observable ; mais cette situation de repos cesse brusquement d’exister sous certaines influences particulières, et notamment aussitôt qu’on introduit dans le mélange une bougie en combustion. L’inaction se transforme en un mouvement énergique, on assiste à une convulsion momentanée qui se révèle par une flamme vive, par un énorme développement de chaleur, par une détonation qui brise le plus souvent les vases employés. Ce bouleversement général est essentiellement passager, à peine a-t-il commencé qu’il se termine, et à cette commotion subite succède une nouvelle période de repos qui, à son tour, se prolonge indéfiniment.