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de l’exportation de l’argent et ont au contraire accru le nombre de leurs hôtels des monnaies, afin de faciliter le monnayage de l’or. Malgré les ressources nouvelles qu’ils y ont puisées, ils n’ont pas échappé, en 1854, à une crise qui a fait baisser chez eux tous les prix, même ceux du fret maritime, si élevés dans toute l’Europe.

Les Anglais n’ont pas eu de mesures à prendre pour arrêter l’exportation de l’argent. Lorsqu’après la paix générale ils renoncèrent au régime du papier-monnaie, ils adoptèrent un système monétaire d’une simplicité qui fait honneur à leur génie. Ils établirent que les débiteurs ne pourraient faire d’offres légales (legal tender) à leurs créanciers qu’en monnaie d’or, toutes les fois que la somme due serait de plus de 50 francs, et après avoir réduit l’argent à l’humble rôle de monnaie d’appoint, ils purent, sans inconvénient, lui donner une valeur intrinsèque assez inférieure à sa valeur nominale pour en empêcher l’exportation. Si à cette combinaison ils avaient ajouté la numération décimale, leur règlement monétaire serait irréprochable.

Nous ne pensons pas que la France, dans les circonstances actuelles, doive recourir au système américain ni au système anglais ; mais s’il se présentait plus tard des circonstances graves et imprévues, si la petite monnaie d’or ne se classait pas bien dans la circulation française, et si l’exportation de l’argent continuait de manière à gêner les appoints et les paiemens qui se font en menue monnaie, il serait peut-être nécessaire d’aviser. Il nous semblerait sage alors d’aller chercher des exemples chez les deux nations les plus riches et les plus commerçantes du monde, et dont les intérêts, par leur nature et par leurs vastes proportions, ont avec les nôtres une analogie économique évidente. Il faudrait peut-être même se concerter avec elles et profiter de l’occasion pour essayer de résoudre cette grande question d’une monnaie internationale qui, depuis de longues années, préoccupe les esprits sérieux en Angleterre, aux États-Unis et en France.

L’expérience est ici le guide le plus sûr, les spéculations abstraites ont leurs périls. Il y a longtemps qu’on l’a dit : en finances, deux et deux ne font pas quatre, C’est qu’en effet les formules des équations n’y ont jamais cette simplicité. Leurs termes se composent de coefficiens