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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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31 août 1855.

L’histoire, dans son cours rapide, a des coïncidences et des spectacles singulièrement frappans : oui, frappans en vérité par ces mystérieuses combinaisons des choses dont ils sont l’expression. Au même instant, une guerre longue et acharnée se poursuit aux deux extrémités de l’Europe, soutenue en commun par les armes françaises et les armes britanniques, si souvent ennemies ; la souveraine de l’Angleterre vient visiter la France au milieu de toutes les pompes royales, quelques années à peine après la république, sous le second empire ; enfin une exposition de tous les produits du globe fait un moment de Paris le centre du monde des arts et de l’industrie. Les destinées de la civilisation livrées au sort des armes, le système général des alliances politiques subissant une épreuve décisive, le travail universel de l’homme se manifestant dans ses inventions et dans ses œuvres, — que faut-il de plus ? Chacun de ces événemens, fût-il seul, suffirait pour fixer l’attention ; la réunion de ces trois faits semble placer sous nos yeux comme une image unique et saisissante des transformations, des contrastes et des tendances de notre temps. Dans la crise qui s’agite aujourd’hui en Europe, c’est du reste, une chose à remarquer, la diplomatie s’efface presque complètement : il est trop tard ou trop tôt pour la diplomatie. Les négociations sont tout au plus le refuge de la politique allemande, qui ne peut pas même arriver à s’entendre sur la meilleure manière de ne rien faire. L’Autriche, bien qu’elle n’ait pas voulu prendre part à la lutte, refuse de se laisser considérer comme une puissance neutre ; elle persiste à maintenir vis-à-vis de la Russie son attitude d’alliée de l’Occident, et à vouloir faire adopter par l’Allemagne tout entière les quatre garanties, dont elle a fait son symbole politique. En un mot, elle voudrait attirer la confédération germanique sur le terrain du traité du 2 décembre tel qu’elle l’interprète. C’est en quoi elle vient se heurter contre la résistance de la Prusse, qui ne veut pas même