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successeurs, Aménophis II, Aménophis III, Toutmès IV, continuèrent d’être reconnus comme les souverains de ce pays. M. Birch, dans un excellent travail que renferment les Mémoires de la Société de littérature de Londres[1], nous apprend qu’on voit sur les monumens du règne de Toutmès IV les chefs de la Mésopotamie apporter humblement leurs tributs à ce monarque.

Il est probable que c’était la guerre contre les pasteurs qui avait amené ces conquêtes des rois égyptiens. En repoussant devant eux les peuples sémitiques, les pharaons de la dix-huitième dynastie avaient pénétré jusque dans la Mésopotamie (Nahraïm). Les faits consignés dans les inscriptions hiéroglyphiques ont reçu dans l’Assyrie même une éclatante confirmation. Un cartouche égyptien, dont on n’a pu malheureusement assigner la place dans les dynasties divines ou historiques, a été lu sur l’un des monumens de Nimroud, que les découvertes de M. Layard ont rendus si célèbres. La dix-huitième dynastie finit au milieu des désordres et des usurpations. Sous un roi appelé longtemps Aten-ra, mais dont le nom se lit maintenant d’une manière certaine Achen-aten, l’Asie secoua le joug de ses dominateurs étrangers. Séti Ier rend à l’Égypte sa puissance et sa grandeur ; il reconquiert la Mésopotamie. Rhamsès II, après avoir étouffé la révolte dont parle Hérodote, étend plus loin sa domination. D’après M. Birch, sous cette nouvelle dynastie, Tyr et Sidon, Béryle, Arad, Sarepta et le Jourdain sont mentionnés dans les inscriptions. L’empire des pharaons avait alors pour voisins dans la Palestine les Chéta, qui formaient une vaste et redoutable confédération. Le Rhamsès-Maïamoun qui relève si glorieusement avec son père Séti l’étendard des armées égyptiennes apparaît dans les souvenirs confus des Grecs sous le nom de Memnon. Ceux-ci, avant Manéthon, connaissaient à peine les noms de quelques pharaons. Quand un mot égyptien arrivait jusqu’à leurs oreilles, ils commettaient les erreurs d’interprétation les plus bizarres et les plus incroyables. Ainsi ce nom de Memnon, que leur avait fourni le mot de Mennou, par lequel on désignait en Égypte les grands monumens, devint pour eux le nom d’un roi qu’ils confondirent tour à tour avec divers pharaons. Tantôt ce fut celui dont le colosse est resté si célèbre par les sons mystérieux qu’il faisait entendre ; tantôt, comme nous le dit Hérodote, ce fut le grand Sésostris. Ainsi que l’a judicieusement observé M. Lepsius dans sa Chronologie des Égyptiens, on perdrait son temps à chercher des identifications entre les noms que nous fournissent les monumens de l’Égypte et ceux que les écrivains de la Grèce nous ont donnés de quelques-uns. Ces noms sont fabuleux pour la plupart, et l’on peut inférer d’un passage de Josèphe qu’ils avaient déjà égaré Manéthon, désireux de mettre l’histoire de son pays d’accord avec les récits des écrivains dont la langue prévalait à la cour des Ptolémées. La découverte du Sérapéum, en nous donnant l’épitaphe de plusieurs bœufs Apis, le règne des pharaons sous lesquels ils sont morts et la date d’une foule d’adorations que les dévots sont venus faire à cet animal sacré, nous fournit des élémens propres à rétablir une partie des desiderata laissés par la chronologie des dynasties postérieures à la dix-neuvième. Ce sont surtout les vingt-deuxième et vingt-troisième dynasties qui recevront

  1. Série 2, vol. II.