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« J’ai encore le cheval que vous m’avez connu en 1842. il a fait toutes mes campagnes en Algérie avec le maréchal duc d’Isly, toutes les expéditions entreprises après son départ, tous mes embarquemens et débarquemens, et il est encore si vigoureux et si beau, que les Anglais me tourmentent chaque jour pour que je le leur vende. C’est impossible : ce vieux compagnon mourra chez moi, et je lui donnerai les invalides dès que j’en aurai la possibilité.

« Le général chef d’état major du 2e corps.

« DE CISSEY. »

« Devant Sébastopol, le 7 avril 1855.

« Vous savez, mon général, que nous allons recevoir prochainement les 2e et 3e régimens de chasseurs d’Afrique. C’est une bonne et heureuse nouvelle, car qui a vu comment se sont comportés, pendant les dures épreuves de cet hiver, les chevaux des 1er et 4e régimens de cette arme comprend les solides services qu’on doit attendre de cet accroissement dans l’effectif de cette excellente troupe.

« L’expérience a donc consacré la théorie, et la pratique vient de donner raison sur de grandes proportions à tout ce que vous avez dit et écrit sur les qualités du cheval barbe. C’est là un résultat utile, au double point de vue des intérêts de l’armée et de votre satisfaction personnelle. En effet, si les vérités que vous avez proclamées sur cet le race étaient déjà familières aux officiers qui ont longtemps servi en Afrique, il n’en était pas de même pour ceux qui ne connaissent pas ce beau et bon pays. Les épreuves qui viennent d’être faites ici, la résistance, la ténacité qu’ont montrées les chevaux d’Afrique pendant la guerre actuelle, les comparaisons auxquelles ils ont donné lieu au milieu de races variées, etc., tout cet ensemble de faits a été de nature à convaincre les plus incrédules, et à prouver une fois de plus les vérités que vous avez mises au jour. C’est un succès qui doit vous rendre heureux.

« Le lieutenant-colonel, aide de camp du général en chef,

« WAUBERT DE GENLIS. »

Ces renseignemens suffiront, je l’espère, pour prouver dès aujourd’hui le cas que fait notre brave armée du cheval arabe. Ses appréciations, du reste, s’accordent avec les traditions et les récits de tous les temps. En effet, et l’on vient d’en avoir la preuve, ce n’est pas uniquement dans son pays, sous un ciel chaud et au milieu d’une nature ardente, que ce cheval brille par sa résistance et ses qualités ; c’est encore dans les pays lointains, par des froids rigoureux et dans des conditions hygiéniques tout autres que celles de son berceau. Tous les climats lui sont bons, toutes les latitudes lui vont et toutes les nourritures lui conviennent ; il peut donc rendre autant de services dans le nord que dans le midi. Je savais, depuis longtemps, à quoi m’en tenir, car j’avais vu le cheval barbe résister aux froids les plus vifs pendant nos campagnes d’hiver dans les âpres montagnes de la Kabylie. C’est aussi l’opinion de l’un de nos officiers-généraux les plus distingués, qui a fait les grandes guerres de l’empire, et de