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retirer, l’acceptation des quatre propositions formulées dans les notes du 8 août, s’est trouvée exclue de la conférence de Vienne, où l’on n’a pas négocié sur d’autres bases que celles des notes du 8 août ; si singulière, disons-nous, que soit cette position, il ne faut pas croire néanmoins qu’au mois d’avril 1854, quelques jours à peine après la déclaration de guerre, ce n’ait rien été que de voir la Prusse liée au moins dans la question de principe avec les puissances occidentales; à bien plus forte raison cela est-il vrai de l’Autriche, dont la conduite n’est pas toujours appréciée comme elle devrait l’être.

L’Autriche a dans cette question des intérêts très certains, mais très divers, très positifs, mais très compliqués. Cela peut ralentir son allure, qui n’a jamais été, que nous sachions, ni vive ni rapide; mais, dans toute cette affaire, elle a toujours été sûre et ferme et plus nette chaque jour qu’elle ne l’avait été la veille. Si l’Autriche, en sa qualité de puissance riveraine du Danube, est intéressée au moins autant que personne à refouler de ce côté l’influence de la Russie, elle est aussi puissance italienne, et elle aussi, elle a pris sa part des dépouilles de la Pologne; si d’un côté elle doit se défendre contre la propagande slave, de l’autre elle est puissance allemande, elle préside la diète germanique, où la majorité des princes, qui seuls y sont représentés, sont à la dévotion de la Russie. Si ferme et si arrêtée que soit sa volonté particulière, elle ne peut cependant pas se séparer de ce grand corps, qui semble avoir été créé pour l’immobilité, que les traités de 1815 ont heureusement constitué comme résistance passive, mais auquel ils n’ont donné que bien peu d’élémens d’activité propre. Qui pourrait comprendre l’Autriche ou la maison de Habsbourg reniant son origine, ses traditions, sa gloire, son honneur, et sacrifiant pour l’intérêt d’une crise passagère le solide appui qu’elle trouvera toujours en Allemagne, aussi longtemps du moins qu’elle-même n’aura pas rompu les liens qui l’attachent à la famille germanique ? C’est une grande garantie de sécurité pour elle, mais qui lui impose aussi des tempéramens, des transactions, des lenteurs dans l’exécution des desseins qu’elle peut concevoir. On ne lui tient pas assez de compte ni de ces nécessités de sa situation, ni de la persistance d’initiative dont elle a d’ailleurs fait preuve depuis un an. Après le traité du 20 avril, c’est le traité du 13 juin, conclu avec la Porte pour l’occupation des principautés durant le siège de Silistrie, c’est ensuite la proposition faite à la diète de se rendre partie au traité du mois d’avril; puis, quand l’Allemagne a accepté, c’est la signature de la note du 8 août, puis la demande de mobilisation des contingens fédéraux, puis le protocole du 28 novembre, et enfin le traité du 2 décembre. Ce sont là des actes