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Nulle part cette instabilité n’est aussi prononcée et surtout aussi durable que dans l’appareil vasculaire. Chargé de nourrir tout le corps, il en partage toutes les vicissitudes. Ses branches, ses rameaux s’accroissent et se multiplient avec les organes où ils portent les sucs nourriciers, s’amoindrissent et disparaissent avec eux. Cet appareil a d’ailleurs ses transformations propres, qui atteignent les parties centrales, les troncs primordiaux et le cœur lui-même. Celui-ci apparaît d’abord comme un cylindre transparent, plein, droit ou à peine ondulé, qui se change en tube par la résorption de la matière centrale. Puis ce canal se courbe en S, se tord sur lui-même, s’étrangle sur un point, s’élargit sur un autre, acquiert des parois épaisses et musculaires, et devient peu à peu ce gros organe à quatre poches distinctes qui occupe presque toute la région moyenne de la poitrine.

Dans l’embryon comme dans l’adulte, le cœur sert d’intermédiaire entre l’organe où le sang épuisé va retrouver sa vertu vivifiante et les organes que ce liquide doit nourrir. Chez l’adulte, qui vit de sa vie propre et respire l’air en nature, l’organe réparateur est le poumon; chez l’embryon, qui est plongé dans un liquide et qui emprunte tout à la mère, la fonction de respiration ou son équivalent revient aux enveloppes de l’œuf. De ce fait seul résultent pour l’un et pour l’autre des dispositions très différentes dans les centres circulatoires.

Chez l’adulte, chaque moitié du cœur, composée de deux cavités, est entièrement séparée de l’autre, et n’est en contact qu’avec une sorte de sang. L’oreillette droite reçoit le sang veineux, qui arrive de toutes les parties du corps et a besoin de respirer, le pousse dans le ventricule droit, et celui-ci le lance dans le poumon par un large vaisseau. L’oreillette gauche reçoit ce sang artériel, qui a respiré, et le pousse dans le ventricule gauche. De celui-ci sort un gros tronc primitif appelé aorte, dont les ramifications portent à tous les organes ce sang revivifié. Chez l’embryon, les poumons sont encore inertes, et leurs vaisseaux rudimentaires. En revanche, un système complet d’artères et de veines met en communication le jeune