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l’année 1853, qui a été une des plus brillantes pour les opérations commerciales de cette ville; mais quand même le commerce extérieur de la Russie serait entièrement paralysé, ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent, cela n’aurait pas, tant s’en faut, des conséquences aussi désastreuses et aussi décisives pour son attitude, comme partie belligérante, que celles que l’auteur croit y trouver.

L’interruption momentanée de ce commerce (nous disons momentanée, car dans la vie des nations quelques années critiques ne sont que des épreuves passagères que le patriotisme peut supporter dans une cause nationale) imposerait sans doute au pays de la gêne, des sacrifices et des privations; mais elle ne réduirait pas aux abois un empire doté de forces productives aussi variées et aussi étendues que celles de la Russie, et dont la prospérité nationale ne repose pas essentiellement, comme celle de l’Angleterre et de quelques autres états, sur l’activité de son commerce extérieur, — ce dernier étant encore chez nous très peu développé comparativement à l’étendue et à la population de l’empire. La valeur totale de nos importations et de nos exportations prises ensemble n’atteint pas un sixième des reviremens du commerce intérieur, qui s’élève, d’après les estimations les plus modérées, a environ cinq milliards de francs.

La foire de Nijni-Novgorod, dont les opérations commerciales s’élèvent jusqu’à la valeur de 60 millions de roubles (240 millions de francs), est le meilleur baromètre du mouvement de notre commerce à l’intérieur et en partie aussi de notre commerce extérieur. Or les résultats de cette foire, qui aurait pu être sérieusement affectée par les circonstances actuelles, ont été, cette année, si satisfaisans, qu’ils ont surpassé toute attente. Les affaires se sont faites rondement, tout a été payé au comptant, et les engagemens de l’année passée ont été exactement soldés.

3° Même page. « Le change a baissé de plus de 20 pour 100[1], l’exportation de l’or est prohibée, les faillites se succèdent et s’accumulent sur toutes les places. »

Nous devons répéter ici ce qui a été dit dans un des articles déjà cités du Journal de Francfort, que la baisse rapide du change de 4 fr. à 3 fr. 8 cent pour un rouble n’a été que le résultat momentané de la défense de l’exportation des monnaies d’or russes, et qu’elle n’a pas même eu la durée d’une seule bourse, car le même jour (1/13 mars) le cours s’est élevé au taux de 3 fr. 25 cent, et depuis ce moment il a monté successivement au point d’avoir bientôt atteint les anciennes cotes, ce qui prouve le peu d’influence que la guerre a exercé en général sur les opérations du change.

Ce fait en lui-même, tel qu’il s’est produit en réalité, et non tel qu’il a été caractérisé par le Moniteur, savoir que le cours du change de Saint-Pétersbourg, tombé rapidement par suite d’une panique instantanée, motivée uniquement par la défense de l’exportation de l’or, s’est relevé par sa propre force, sans le concours d’aucune mesure exceptionnelle, malgré le maintien de la mesure prohibitive concernant l’exportation de l’or et malgré la continuation de la guerre, ce fait, disons-nous, est à nos yeux la meilleure preuve

  1. La valeur du rouble-argent est tombée de 4 fr. à 3 fr. 8 cent.