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des vents, des tempêtes et des orages, les particularités des marées de nos côtes et de nos rivières, — tous phénomènes non moins remarquables ou imposans que ceux auxquels les touristes ont donné une célébrité européenne.

Nous avons déjà signalé dans cette Revue la beauté et la salubrité de climat des régions de la France qui longent la Méditerranée dans la portion occidentale de son bassin. Cependant on met toujours un voyage en Italie au rang des jouissances hygiéniques que procure un climat privilégié ; or rien ne serait plus facile que de prouver la supériorité de la France sur l’Italie, en comparant les deux bords opposés de la Méditerranée. Tout le monde sait du reste que les Romains quittaient l’été le sol brûlant et malsain de leur pays pour les vallées fraîches et salubres du Roussillon et de la Gaule narbonnaise. En signalant la France à l’attention des voyageurs et surtout de ses propres habitans, il faut reconnaître toutefois qu’il leur manque beaucoup des données qui peuvent rendre un voyage utile. Sans doute il est pour chaque province, et principalement pour les grandes villes, des itinéraires descriptifs où l’on peut recueillir quelques indications scientifiques ; mais l’énumération des monumens et des produits de la civilisation y occupe toujours la plus grande place. On semble ne voyager que pour voir les hommes et non point la nature ; on oublie que c’est la qualité du terrain et toute la météorologie en général qui sert de base à la population, qui détermine ses subsistances, son commerce, ses manufactures, et les influences beaucoup trop négligées auxquelles est soumise la santé publique.

La description physique de chaque localité devenant ainsi l’objet d’un travail spécial, la science aurait bientôt d’utiles résultats à signaler, et l’ensemble de ces monographies météorologiques ne tarderait pas à constituer pour la France de précieux matériaux qu’on exploiterait ensuite tant au profit des théories physiques qu’au point de vue de la statistique et de l’économie politique. Plusieurs bons esprits isolés et fixés sur divers points de la France, qui ne trouvent point à employer utilement leurs loisirs et leur capacité, pourraient se charger de ces reconnaissances météorologiques, si les corps savans surtout avaient publié des canevas ou listes d’observations à faire et de renseignemens à recueillir. Au total, il s’agit d’abord de faire, sauf à faire mieux ensuite. Les Grecs, trois siècles avant notre ère, étaient déjà riches de descriptions topographiques : « Il est des écrivains, dit Aristote, qui nous ont représenté la nature d’une contrée restreinte, l’aspect d’une seule ville, le cours d’un vaste fleuve, les beaux sites d’une montagne. Nous avons la description du mont Ossa, celle de la ville de Nyssa, consacrée à Bacchus, celle