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qu’il combat dans la seconde; nous trouvons maintenant Melloni dans une situation identique, au sens près, — et comme si la matière des raisonnemens avait été épuisée par Herschel, Melloni les reproduit, les discute, les soumet au contrôle de l’expérience, et ne quitte le sujet qu’après avoir fait disparaître l’incompatibilité apparente des faits et de la théorie d’identité.

«...Ces vues théoriques, dit Melloni, paraissent les seules admissibles dans l’état actuel de la science; si l’on voulait en embrasser d’autres, il faudrait, suivant les principes de la philosophie naturelle, démontrer d’abord l’impossibilité de rallier à une cause unique tous les faits qui constituent les sciences de l’optique et de la chaleur rayonnante. Cependant, malgré les analogies qui se rencontrent entre deux sciences si voisines, malgré les actions communes auxquelles les deux agens se soumettent, nous voyons des différences se produire, et les mêmes corps se comportent quelquefois d’une manière complètement opposée sur les deux espèces de radiations. Cette opposition ne suffit-elle point pour donner le droit d’admettre que la chaleur rayonnante est un agent distinct de la lumière[1] ? » Cette question, on se le rappelle, était une de celles qu’avait agitées Herschel. Melloni, après l’avoir posée, répond : « On le dirait au premier abord, et j’ai été moi-même de cet avis pendant longtemps; » mais après un examen attentif il explique ces différences par un raisonnement que nous avons déjà trouvé sous la plume de son devancier. Je cite textuellement Melloni :

« Imaginons trois milieux parfaitement incolores, — l’un perméable à toute sorte de rayons, l’autre perméable aux rayons lumineux et à une partie des rayons obscurs, l’autre enfin perméable aux seuls rayons lumineux.

« Il est facile de se convaincre que ces trois milieux si limpides et privés de toute couleur apparente auront, relativement à la somme des radiations lumineuses et des radiations obscures, des propriétés de coloration très distinctes, car le premier sera un corps. Véritablement incolore pour la série entière des rayons, le second constituera une substance colorée par rapport au groupe des rayons obscurs, et le troisième sera un milieu opaque à l’égard de ces derniers rayons, malgré sa transparence parfaite par les radiations lumineuses. Tous trois agiront inégalement, mais cette inégalité résultera d’actions égales sur les rayons lumineux et inégales sur les rayons obscurs[2]. »

Dans toutes les questions controversées, il y a toujours certains

  1. Thermochrose, page 236.
  2. Ibid., page 244.