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liberté, non plus comme ayant trait uniquement à l’ordre de succession établi en France (dont nos traités ne parlent pas), mais comme un objet d’un intérêt général pour la politique européenne. Sous ce rapport, sa véritable importance ne saurait être sentie d’avance, car elle ne peut se déterminer que par les circonstances qui auront accompagné ces événemens funestes. »


Après avoir justifié de la sorte le refus du cabinet de Londres de se prêter au concert proposé par l’Autriche, lord Castlereagh repoussait les explications malveillantes que certaines personnes donnaient de ce refus. On reprochait généralement à l’ambassadeur d’Angleterre en France de se montrer trop favorable au ministère de M. Decazes et même au parti ultra-libéral. À la manière dont lord Castlereagh charge lord Stewart de le défendre auprès du cabinet autrichien, on voit qu’il avait lui-même quelques doutes sur la complète rectitude des procédés du représentant britannique à Paris.


« Votre excellence saisira… l’occasion de s’expliquer de nouveau sur ce sujet avec le prince de Metternich, et de l’assurer que le ministère du prince régent n’est jamais entré en relations exclusives et confidentielles avec le gouvernement français, et n’a même jamais eu avec lui d’autres rapports que ceux qui résultent naturellement de l’état d’amitié existant entre les deux pays, et des liens que les traités publics de paix et d’alliance ont fait contracter. — Nous n’avons jamais cherché, même momentanément, à exercer une influence suivie et systématique sur les conseils de la France, et notre ambassadeur ne s’est jamais, du moins à notre connaissance, entendu d’un manière isolée avec le ministère français sur aucun objet politique. En se séparant ainsi des conseils de ses collègues les ministres des puissances alliées, il aurait agi en opposition directe aux ordres précis et réitérés qu’il a reçu de notre gouvernement. Les ministres du prince régent ne se font pas illusion sur les fautes commises par les administrations qui se sont succédé en France, ni sur les dangers qui pourront tôt ou tard résulter pour l’Europe des dissensions intérieures de ce pays ;… mais le cabinet anglais a toujours douté… qu’une intervention des alliés pût être utile pour prévenir ce péril… Cette question nous a toujours paru de nature à être résolue négativement. Si le roi de France ou les ministres qui composent son conseil… pouvaient à leur gré diriger la marche des affaires.., le cabinet de Londres aurait, avec celui de Saint-Pétersbourg qu’un énoncé grave et solennel des sérieuses alarmes que les cours alliées ont conçues serait de quelque utilité ; mais il nous a toujours semblé que les obstacles qui s’opposent en France à l’établissement d’une administration sage et stable proviennent de tout autres causes que de l’absence de bonnes intentions ou des dispositions particulières des ministres du roi. Ces obstacles, le gouvernement britannique les voit plutôt dans les effets prolongés de la révolution, dans la composition actuelle de la législature, dans la nouveauté pour la France du système représentatif,. ; il les voit enfin en grande partie dans les résultats des lois sur les élections et la recrutement, concessions faites aux vœux de l’armée et du peuple, adoptées sans nul doute dans les intentions les plus pures,… mais qui n’ont cessé…