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la direction de quelques Européens) des provinces du nord-ouest, dit, dans son rapport sur l’état de l’enseignement dans ces provinces, que les gens du pays le prenaient pour un missionnaire. Et pourquoi ? dit-il lui-même. Parce que je parle en public comme eux ; comme eux, je distribue des livres ; comme eux, j’emploie des agens indigènes : mon but doit être, comme celui des missionnaires, de persuader à mes auditeurs d’abandonner leur religion et d’embrasser le christianisme ! — Il regarde en conséquence l’intervention des missionnaires comme un grand obstacle même en ce qui touche à l’éducation indigène ; — que doit-ce donc être qu’une éducation tout anglaise, où les parens ne sauraient avoir (au moins l’immense majorité) la moindre notion de ce qu’on fait étudier à leurs enfans ? Ceci montre assez combien on doit redouter en général dans les familles indiennes l’éducation anglaise. On pourra remédier en grande partie à ce mal en instruisant les enfans à l’aide du langage indigène. Quoique la volonté du gouvernement soit de respecter les préjugés nationaux, néanmoins le mot seul anglais a quelque chose d’impur en lui-même, qui offense l’oreille de l’Hindou qui n’a pas reçu une éducation européenne ! »


Que dites-vous d’une pareille déclaration faite par un Hindou élevé dans un collège anglais, déclaration écrite par cet Hindou en anglais et publiée par le comité anglais d’éducation à Bombay, qui décerne à l’auteur une médaille d’or ?

Bhâskar-Dâmodar, brahman de la caste chitpawan, est l’auteur du second essai couronné par l’institution Elphinstone : On the advantages that would, etc. (sur les avantages que l’Inde retirerait de l’établissement d’un saraï ou bangalow public à Londres, avec enceinte, jardin, puits, etc., destiné à recevoir les voyageurs indigènes ou hindoustanys).


« Londres (dit l’auteur) a maintenant plus d’attractions pour les habitans de notre pays qu’aucune autre capitale ! Londres ! le centre des sciences, des arts, de la richesse, de la magnificence, du pouvoir ! Londres ! d’où seulement peut venir le bien-être de l’Inde, politiquement, socialement et de toutes manières… L’Angleterre a une supériorité actuelle sur presque tous (si ce n’est sur tous) les autres pays dans les sciences, les arts, le commerce. »


Dans un autre passage du même écrit, nous trouvons une appréciation remarquable des immenses difficultés que rencontre l’influence européenne, quand elle cherche à triompher, d’l’aide de la science, des préjugés enracinés des Hindous. Le brahman Bhâskar-Dâmodar, parlant de ce grand fait cosmologique, — la rondeur de la terre, — remarque que ce fait est nié obstinément par les Hindous d’aujourd’hui, parce que ceux-ci maintiennent qu’il n’en est pas fait mention dans les traités d’astronomie hindous, etc. On leur prouve, par la lecture de divers passages du Gholadhyaya de Bhâskârachârya (l’auteur le plus renommé des temps comparativement modernes), qu’ils sont dans l’erreur sur ce point : ils ne veulent pas admettre l’autorité de