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particulièrement des classes les plus pauvres et les plus nombreuses. Lorsque je sortis, il y a quelques jours, du palais de cristal, le souvenir de cette conversation m’ est revenu à l’esprit, et je me suis dit que parmi les bienfaiteurs de notre race, il faudrait placer le nom de l’homme qui conçut l’idée de cette populaire entreprise et qui l’exécuta. Cet homme, dont le nom doit être honoré et béni, quel est-il ? Il s’appelle légion, car cette grande et généreuse pensée n’est pas celle d’un homme seul ; elle est l’expression du progrès d’un peuple entier, d’une nation forte qui depuis quelques années marche avec persévérance dans cette voie large et loyale où les puissans aident les faibles, les savans instruisent les ignorans, les bons améliorent les mauvais, où en un mot l’amour s’étend de plus en plus entre toutes les classes de la société et les relie entre elles pour le bien, le bonheur et l’avantage de toutes.

C’est en effet un des traits caractéristiques de la vie de la nation anglaise pendant ces dernières années, que ce travail constant des individus comme du gouvernement en faveur du peuple. Morale, science, industrie, tout a été mis à la portée des classes nombreuses, pauvres et ignorantes. On n’a pas oublié la grande réforme douanière et industrielle de sir Robert Peel, qui avait pour but direct et qui a eu pour résultat immédiat l’amélioration de la condition physique du peuple. Si l’on se place à un autre point de vue, n’est-elle pas innombrable, la quantité publiée dernièrement en Angleterre de ces petits écrits populaires à très bon marché, guides pour la conduite de la vie, directions pour le choix d’un état, de traités scientifiques à la portée des esprits les moins cultivés, et d’une utilité pratique précieuse pour les plus simples ouvriers ? Bien plus, des savans de premier ordre, des économistes distingués, des hommes politiques, comprenant que le temps est venu pour les classes supérieures d’entrer en rapport direct avec le peuple, ont ouvert des cours publics dans les grands centres d’industrie, et ils y professent eux-mêmes gratuitement. Quelle belle et sainte communion que celle de l’éducation et de l’instruction, trésors qui ne doivent pas plus que l’or et l’argent rester l’apanage exclusif de la naissance, et qui, répandus avec libéralité par les plus riches sur les plus humbles, créent et cimentent des liens de fraternité et d’égalité bien autrement réels et puissans que ceux résultant d’institutions sociales ou de lois politiques toujours fragiles et transitoires ?

Si le sentiment qui a inspiré l’idée du palais de Sydenham est des plus généreux, il faut reconnaître que l’exécution a été digne de la conception. C’est un immense bâtiment avec une charpente en fer et des murs en plaques de verre ; sa forme est celle d’une nef coupée au milieu par un transept beaucoup plus élevé et aux deux extrémités par deux autres transepts un peu moins hauts ; les toits sont