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renouvellement de la ligue héréditaire, et le rappel des Suisses au service de Wurtemberg, et une démonstration éclatante contre la candidature de François Ier à l’empire[1]. La diète de Zurich renvoya l’ambassadeur de ce prince, en lui déclarant qu’elle ne voulait pas pour empereur son maître, qui devait se contenter d’un aussi grand royaume que celui de France, et lui signifia qu’elle l’empêcherait de tout son pouvoir de parvenir à l’empire. En effet elle écrivit aux électeurs pour les détourner de choisir François Ier, et au pape pour l’imiter à ne plus gêner le choix des électeurs. Elle dit que les Suisses ne s’étaient jamais séparés du saint-siège, naguère encore protégé par eux sous le pontificat de Jules II, ni du corps germanique, dont ils continuaient à être membres, et qu’ils demandaient, dans l’intérêt commun de la chrétienté et du saint empire, un chef tiré de la nation allemande et non de la nation welsche Lettre du 4 avril 1519 écrite de Zurich par les Suisses aux électeurs. Dans Bucholtz, vol. I, p. 97. </ref>.

Cette démarche des Suisses, jointe à la défaite du duc Ulric de Wurtemberg dans le midi de l’Allemagne et à l’échec que les ducs de Calenberg et de Wolfenbüttel, partisans dévoués de l’Autriche, venaient de faire éprouver au duc de Lanebourg dans le nord, — au triomphe de la ligue de Souabe, qui avait renouvelé l’alliance héréditaire avec la maison d’Autriche et défendu aux banquiers des villes confédérées de prêter le concours du change au roi très chrétien dans ses poursuites électorales, — porta un grand coup aux affaires de ce prince en Allemagne. François Ier en fut alarmé et irrité. Il écrivit à ses ambassadeurs : « Je serais très aise que l’affaire se pût conduire sans entrer en guerre, pour éviter le hasard et l’effusion du sang humain. Toutefois, puisque les choses en sont venues où elles sont, me désister me serait une honte, et par-ci après les Suisses voudraient me donner la loi, ce qui me serait fort grief à porter. J’ai fait dresser une armée de quarante mille hommes de pied pour six mois. Si on m’assaille, je mettrai peine à me défendre. Vous entendez assez la cause qui me meut de parvenir à l’empire, et qui est d’empêcher que le roi catholique n’y parvienne. S’il y parvenait, vu la grandeur des royaumes et des seigneuries qu’il tient, cela me pourrait, par succession de temps, porter un préjudice inestimable. Je serais toujours en doute et soupçon, et il est à penser qu’il mettrait bonne peine à me jeter hors de l’Italie[2]

Le roi de France avait longtemps hésité entre les conseils de l’archevêque de Trêves, qui le dissuadait de lever des troupes, de peur

  1. Lettre de Maximilien de Berghes au roi de Castille, du 12 avril, à Constance. — Le Glay, Négociations, etc., vol. II, p. 415 à 424.
  2. Lettre de François Ier à ses ambassadeurs, du 16 avril. Mss. de La Mare, 10330/3, f° 78.