Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 5.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

élection, que le margrave Joachim, qui était chargé de conclure pour son frère et pour lui, se faisait fort de gagner aussi l’électeur de Cologne sur lequel il exerçait beaucoup d’influence, — que le roi d’Angleterre lui promettait son appui, un peu mystérieusement, il est vrai[1], et que le pape se déclarait très haut en sa faveur.

Léon X n’aurait désiré pour empereur ni un duc de Milan, ni un roi de Naples; mais, obligé de choisir entre eux, il préféra le premier, qui semblait moins redoutable au saint-siège, et qui d’ailleurs n’était pas exclu du trône impérial, comme le second, par une constitution pontificale. Il adjoignit au cardinal de Saint-Sixte, son légat en Allemagne, et au protonotaire Carracioli l’archevêque de Reggio, Orsini, entièrement dévoué au roi très chrétien. Léon X, ne comptant plus sur la croisade générale, n’avait d’espoir qu’en François Ier pour repousser les Turcs. Il se déclara donc ouvertement en sa faveur, et il lui écrivit : « Dans l’intérêt de la république et pour le salut commun, nous avons jugé que votre majesté est éminemment propre à l’empire, tant à cause des insignes vertus par lesquelles Dieu, dispensateur de tous les biens, vous a distingué, que parce que, surpassant en richesse et en puissance les autres rois chrétiens, vous tiendrez tête à la fougueuse attaque des farouches barbares, et que vous êtes plutôt en mesure d’abattre l’orgueil et l’insolence que font peser sur nous les impies Turcs, et de rétablir. Dieu aidant, la vraie foi dans son ancien éclat. Nous en avons la confiance. C’est pourquoi, mus moins par la considération de notre alliance particulière que par le motif du salut commun et du bien universel, nous avons donné et donnerons tous nos soins et nous interposerons notre autorité, afin que vous soyez choisi comme le plus utile empereur de la république chrétienne. Pour mieux faciliter un événement aussi avantageux, et pour induire ceux qui ont le pouvoir d’élire un empereur à y concourir non-seulement par vertu, mais par de justes et légitimes récompenses, nous promettons à votre majesté, sur la parole d’un pontife romain, et nous lui engageons très sincèrement notre foi, que, si vous obtenez le titre impérial par les bons offices et les suffrages de nos vénérables frères les archevêques de Cologne et de Trêves, électeurs du saint empire romain, nous les appellerons, à la demande de votre majesté, dans l’ordre très considérable des cardinaux de la sainte église romaine, et les honorerons volontiers d’une si grande dignité. Cette promesse, que nous faisons à votre majesté, nous vous accordons, par les présentes,

  1. « J’ay receu lettres du roi d’Angleterre très honnestes et tant gratieuses qu’il n’est possible de plus. » François Ier à l’amiral Bonnivet, 7 février. Mss. de La Mare, 10532/3, f° 50.