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s’est imposé l’obligation d’obéir aux religieux ses maîtres. Avant l’aurore, il doit être sur pied. Comme le disciple du brahmane dans la maison de son maître, c’est lui qui balaie les cellules, la cour, les abords du couvent; c’est lui aussi qui va chercher l’eau, et de plus il la filtre, pour empêcher que les invisibles animalcules contenus dans le liquide ne soient mis à mort en passant par le gosier. Ce travail achevé, le novice médite durant une demi-heure et fait son examen de conscience. Quand la cloche sonne, il va présenter des fleurs aux reliques de Bouddha déposées sous un petit dôme; il médite encore sur les perfections de ce saint personnage et lui demande pardon de ses fautes en l’adorant; puis il consulte le calendrier pour apprendre à connaître l’heure par la longueur de l’ombre et calculer combien de jours se sont passés depuis que le bienheureux Bouddha est entré dans le néant. Cependant il faut songer à prendre de la nourriture, et voilà que le novice, marchant derrière son précepteur spirituel et tenant à la mam le plat rond destiné à recevoir les aumônes, sort du monastère sans empressement, d’un air calme et béat. Quand il approche d’un village, il doit nettoyer un petit espace au milieu de la route, afin de déployer sans crainte de la gâter et de poser proprement sur le dos de son maître la robe jaune qui désigne celui-ci au respect des laïques. Que Bouddha lui fasse la grâce de ne rencontrer en sa route ni femmes, ni éléphans, ni chevaux, ni chariots, ni soldats ! Il est voué au célibat, et tout ce qui rappelle la guerre, tout ce qui, par son poids, par sa marche pesante ou rapide, cause la mort des êtres, hommes ou insectes, blesse sa sensibilité. Au retour, il plie proprement la robe jaune, lave les pieds du précepteur, rince le plat aux aumônes et le fait sécher au soleil. L’après midi se passe en lectures, en récitations et en méditations, jusqu’à l’heure où il est permis au novice d’aller reposer sur sa couchette. Si le jeune religieux a des doutes, il se hâte de les confier au maître, qui les efface de son esprit par une sa- vante explication; s’il a commis quelques fautes, il va de la même manière trouver le précepteur et lui faire sa confession. Il ne doit rien laisser dans son cœur qui puisse en altérer la sérénité. Ne lui a-t-on pas appris que les quatre causes de perdition pour l’espèce humaine sont le mauvais désir, la colère, la crainte et l’ignorance ?


II.

« L’action procède de l’esprit, » dit l’axiome bouddhique, et comme l’ignorance est la grande maladie de l’esprit, il importe que le novice s’instruise. Aussi lui met-on entre les mains un grand nombre de traités de morale et de discipline, ainsi que des ouvrages