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LA


VIE D'UN CLOWN.




Mémoirs of Joseph Grimaldi, edited by Boz, a new edition ; London, 1853.




En 1837, à Pentonville, dans un faubourg de Londres, au nord de la froide capitale anglaise, un pauvre vieillard achevait sa vie. Il était impotent, estropié, à demi paralytique. Auprès du fauteuil où il passait, occupé à écrire, la plus grande partie de ses tristes journées, point de parens, point d’autres soins que ceux d’une voisine charitable, jadis domestique dans la famille du moribond. Cet homme, l’année précédente, avait conduit le deuil d’un fils unique, dont la fin misérable, suite de honteux excès, avait déçu ses plus chères espérances. Six mois plus tard, un autre convoi était sorti de la même demeure, mené par le même vieillard, autour de qui la mort semblait épuiser ses coups avant de le frapper lui-même. Cette fois, il enterrait sa femme, depuis longtemps sa camarade et sa compagne…, sa camarade, avons-nous dit, car cet homme était un comédien, et moins qu’un comédien peut-être, -c’était un clown.

De temps à autre s’arrêtait à sa porte quelque leste cabriolet, quelque fringant attelage. On en voyait descendre soit un chanteur au teint fleuri, au gosier doublé d’or, soit quelque princesse du corps de ballet, quelque reine de la pirouette et du jeté-battu, accourus en