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seconde partie est un tableau politique de l’Europe depuis l’époque où, selon l’auteur, l’histoire commence à devenir réellement utile, savoir le XVIe siècle. Les deux dernières lettres formeraient à elles seules un ouvrage spécial. C’est l’esquisse des événemens qui se sont passés entre la paix des Pyrénées et la paix d’Utrecht. Nous avons parlé de cet écrit, nous n’y reviendrons pas.

Cet ouvrage montre qu’il n’avait pas tout à fait oublié la politique. Dans son inaction forcée, il écrivait du moins à Wyndham (1735-1740), et tout en se disant revenu de toutes choses, il répétait, comme si le public pouvait l’entendre, que la corruption minait le gouvernement anglais au point d’anéantir la constitution. « Il y a tyrannie, dit-il, le mot n’est pas trop fort, car partout où une volonté prévaut sans contrôle, volonté de roi ou volonté de ministre, la tyrannie est établie; » et le mal est tel qu’il exclut le remède, les forces mêmes qui le devraient guérir en étant devenues le siège. Aussi, quant à lui, renonce-t-il à tenter l’impossible. Dans son mépris pour le pouvoir et les partis, une seule pensée le console, un seul exemple le soutient : c’est la conduite de Frédéric, prince de Galles. L’héritier de la couronne en effet n’avait pas manqué de se déclarer contre la couronne; le fils était en lutte ouverte avec son père. Bolingbroke lui envoyait de loin des éloges qui devenaient des conseils, et il concevait une vague espérance d’être dans sa vieillesse le confident du futur roi. Il avait interrompu ses lettres sur l’histoire pour en composer une sur l’Esprit de patriotisme. C’est une amplification dans le goût des anciens, mais au fond c’est la vieille thèse de l’absorption des partis dans une coalition de patriotes. Lord Cornbury fut probablement chargé de faire arriver ce morceau sous les yeux du prince. C’était la destination plus évidente encore de deux lettres adressées à Lyttelton, alors engagé comme Pitt, son allié, dans l’opposition de cour de Leicester-House (1738). L’une était une peinture de l’état des partis à l’avènement de George Ier, fragment apologétique destiné à réconcilier Bolingbroke avec la maison de Hanovre; l’autre, sous ce titre : Idée d’un roi patriote, est une déclamation brillamment écrite, ouïe portrait d’un monarque qui, tout-puissant par le respect même de la constitution, s’élève au-dessus des partis parce qu’il s’élève au-dessus des passions, et qui obtient