Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 4.djvu/538

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
DES


INFLUENCES ROYALES


EN LITTÉRATURE.





FRÉDÉRIC II.


Histoire philosophie de l’Académie de Prusse, par M. Bartholmèss.




Lorsque Napoléon appelait Talma à Erfurt, et faisait représenter les chefs-d’œuvre de la poésie française devant un parterre de rois. c’était l’image visible et matérielle de ce qui s’était passé cinquante ans plus tôt dans la région des idées. Grâce à son rayonnement inépuisable, à son irrésistible attraction, le génie français au XVIIIe siècle s’était créé un auditoire de princes et de souverains. Les rois de Prusse, de Suède, de Danemark, de Pologne, les princes d’Allemagne, l’impératrice de Russie, tous subissaient ou feignaient de subir cet ascendant universel, tous semblaient épris d’amour pour les idées libérales dont la France devenait le foyer. Ils entretenaient à Paris des correspondans littéraires chargés de les tenir au courant des petits vers et des gros ouvrages, résidens de nouvelle espèce auprès de cette nouvelle royauté. Eux-mêmes correspondaient avec nos grands écrivains et se disputaient l’honneur de les recevoir à leur cour. Jamais l’intelligence humaine n’avait reçu d’aussi éclatans hommages, et c’était à notre patrie qu’il était donné d’étaler ce grand spectacle devant le monde, compensation suffisante aux hontes de notre politique. Nous étions vaincus à Rosbach, nous signions le