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l’univers est considéré non-seulement au point de vue descriptif et infaillible, mais encore il est mis en relation avec l’âme de l’homme ou plutôt de l’humanité entière dans les divers siècles. Cette admission de l’histoire et de la métaphysique sur le terrain de la science observatrice n’a pas été goûtée par tous les esprits, soit que l’on craignît un retour vers la science dogmatique, soit que l’on fût frappé de la nouveauté seule. Cependant tout ce qui, dans cette partie du livre, appartenait à la science d’exposition pure et simple était au-dessus de tout reproche.

Dans le volume récemment paru, la science descriptive règne exclusivement, et le succès de l’ouvrage a été incontesté et universel[1]. Le troisième volume du Cosmos surpasse, à notre avis, les deux précédens par la vigueur de style, par la profondeur de vues, par la flexibilité de la pensée, enfin par la solidité de déductions analogiques, qui en font un tableau des phénomènes célestes exposés suivant la science que l’on peut hardiment appeler française, c’est-à-dire sans aucun mélange de la métaphysique allemande ou, si l’on veut, platonicienne. Le quatrième, non encore traduit, contient l’exposé des phénomènes du globe terrestre, comme le précédent traitait des phénomènes du ciel. On peut dire que M. de Humboldt, l’un des fondateurs de la physique terrestre, est là sur son terrain plus encore que dans le domaine de la physique céleste.

C’est la partie astronomique du livre de M. de Humboldt qui appellera surtout aujourd’hui notre attention; mais avant de suivre l’auteur du Cosmos dans son exploration des espaces célestes, nous avons à dire un mot des vues philosophiques qui précèdent et amènent cette partie purement descriptive de son œuvre. On aura ainsi une idée plus complète de l’imposant ensemble auquel se rattache le tableau du ciel tel que nous essaierons de le tracer d’après M. de Humboldt.


I.

Dans le petit traité sur le monde, sur le cosmos, que l’on trouve dans les œuvres d’Aristote, et qui contient, notamment sur l’existence du continent américain, des vues d’une portée merveilleuse, le

  1. En Angleterre, l’ouvrage a été traduit par Mme Sabine, aidée des conseils et sous la direction de son mari, le colonel Sabine, illustre savant anglais, et de l’auteur même du Cosmos. En France, le premier volume et la première partie du troisième ont eu pour traducteur M. Faye, l’un de nos premiers astronomes français, qui a même fourni quelques additions ou renseignemens. Au moment où commençait la publication du Cosmos, M. de Quatrefages en faisait l’objet d’une étude dans cette Revue (1er juin 1846), et M. de Humboldt avait publié ici même l’introduction de son livre (1er décembre 1845).