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Il en était de même de la ferme, qui attendait encore son colon capitaliste. L’église seule remplissait sa destination et était desservie par son curé.

Plus on s’avance de Saint-Ferdinand vers Maëlma, à l’ouest, plus les coteaux se relèvent, plus aussi leurs pentes deviennent abruptes, leurs ravins déchirés et décharnés, leurs broussailles horribles et hérissées; mais Maëlma, à cause de cette élévation même, était un point éminemment stratégique, dominant d’une part la plaine de Staouéli, dont il est le poste avancé, et de l’autre les bords du Mazafran et les deux passages que nous y avons établis au moyen des ponts qui desservent la route d’Alger à Koleah par la Metidja et la seconde route d’Alger à Koléah par Staouéli. Aussi ce point avait-il été occupé par un camp avant de l’être par un village militaire. On a vu à Beni-Mered quelle était l’organisation de ces villages et sur quelles combinaisons le maréchal avait échafaudé son projet de colonisation par l’armée. Il n’y avait entre Beni-Mered et Maëlma d’autre différence que celle des localités; mais celle-ci était grande, Maëlma n’étant par lui-même et par le voisinage de Zeralda que la capitale de la fièvre et du palmier nain : aussi lui avait-on donné un docteur en médecine, quoique la population du village fût seulement de 29 colons militaires et de 8 civils, en tout 37. La fondation de Maëlma, un peu postérieure à celle de Beni-Mered, ne remontait qu’au mois de février 1843. Comme à Beni-Mered, la dissolution de la communauté s’y était faite avant le temps. La répartition des lots s’était faite alors au choix des hommes par droit d’ancienneté : singulier privilège de caserne quand on l’appliquait à trancher la question capitale de leur vie civile! Les lots de terre en effet étaient très inégaux, et il importait gravement de pouvoir choisir. Les premiers mariés ont reçu en outre 80 francs pour l’installation du ménage; les plus tardifs n’ont rien reçu. Cinq de ces colons militaires avaient abandonné leur concession aussitôt après leur libération du service. Il y avait deux sortes de maisons, de grand et de petit modèle, dix-neuf des premières et dix des autres. A la dissolution, elles furent aussi prises au choix par droit d’ancienneté.

Le quartier civil se composait de huit maisons semblables et construites d’avance. Le concessionnaire les devait rembourser au prix de 1,000 francs, qu’on réduisit plus tard à la moitié en considération de la pauvreté du village..Maëlma est un pays perdu et sans débouchés, car on ne peut considérer comme tels les bourgades de Koléah et de Douéra, qui produisent elles-mêmes ce qu’elles consomment de céréales et de fourrages, ou sont entourées de villages plus rapprochés. Jusqu’à ce que ces petites villes aient pris quelque importance, le seul marché de Maëlma est donc Alger, qui est à trois journées, aller et retour, pour les attelages de bœufs. On a vu ce que donnaient de produit net les blés et les orges du Sahel dans des sites meilleurs que celui de Maëlma. Trois ou quatre journées d’absence pour un homme et son attelage absorberaient le plus clair de son bénéfice. Maëlma est donc condamné à consommer ce qu’il produit, ou à ne produire que l’équivalent de sa consommation, c’est-à-dire à vivre de misère. Il n’est d’ailleurs sur aucune route de passage, celles dont il est doté du côté de Douéra et du côté du Mazafran ne servant qu’à son usage particulier.

Jamais je n’ai vu le palmier nain aussi fourré qu’autour de la ferme dont