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le petit comté de Huntingdon, qui n’a pas tout à fait 100,000 hectares, et ne compte que 60,000 habitans. Tout petit qu’il est, il a joué un grand rôle dans l’histoire d’Angleterre, car c’est la patrie de Cromwell. Rien ne le recommande spécialement à l’attention sous le rapport agricole.

Si le comté de Norfolk a occupé longtemps le premier rang en Angleterre pour le développement rural, cette place lui est aujourd’hui disputée par le comté de Lincoln, qui était, il y a un siècle, encore plus stérile et plus désert. Ce comté est un des plus grands, il a environ 680,000 hectares; aussi doit-il être divisé en trois districts agricoles très différens les uns des autres : les marais au sud et à l’est, les wolds ou plateaux au nord’, et les bruyères à l’ouest. Le district des marais a pris le nom de la Hollande, et lui ressemble beaucoup en effet. Ce sont les mêmes digues qui s’avancent tous les jours de plus en plus et gagnent sur la mer de nouveaux terrains; ce sont les mêmes prairies et presque les mêmes troupeaux, c’est le même aspect vert, bas et humide. Sur quelques points, le haut prix des grains avait encouragé la culture des céréales; mais cette culture recule aujourd’hui de toutes parts, et les herbages, mieux appropriés au sol, lui succèdent. La rente y atteint en moyenne 100 fr. Les wolds sont des plateaux arides et nus, à sous-sol calcaire, que l’assolement quadriennal a tout à fait transformés. C’est aujourd’hui un beau pays de culture qui ne se loue pas moins de 75 fr. l’hectare en moyenne; on y élève beaucoup de bétail, qu’on n’y nourrit guère qu’en hiver, une ferme dans les wolds ayant ordinairement pour annexe un pâturage dans le marais, où l’on envoie les bestiaux pendant l’été. L’assolement de Norfolk y est assez généralement modifié, en ce sens que le trèfle occupe deux ans la terre, et que le blé ne revient que tous les cinq ans. Cette modification est maintenant aussi généralement suivie que l’assolement primitif, parce qu’elle épargne la main-d’œuvre; mais il est douteux qu’elle vaille mieux. Ce qu’on appelait autrefois la bruyère de Lincoln, Lincoln heath, était peut-être plus maigre encore; la transformation n’en est pas moins complète.

Comme les comtés de Norfolk, de Bedford et de Northampton, le Lincoln a dû surtout le prodigieux changement que l’on y admire aujourd’hui à un riche propriétaire, lord Yarborough. Les terres de lord Yarborough ont environ 30,000 acres ou 12,000 hectares, qui rapportent aujourd’hui 30,000 livres sterling de revenu, et qui n’en , rapportaient peut-être pas le dixième il y a un siècle. Pour donner une idée de ce qu’était autrefois ce pays, aujourd’hui si peuplé et si cultivé, on raconte que, près de Lincoln même, on avait élevé, il n’y a pas plus de cent ans, une tour avec un phare pour servir