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c’est la Sologne de l’Angleterre. On en a défriché plusieurs parties, on en a planté d’autres en arbres résineux, mais il en est beaucoup resté à l’état inculte, et ce qui a été cultivé a fort mal payé les frais de culture. Les landes reparaissent vers le sud-ouest, où se trouvait la grande forêt appelée forêt nouvelle, new forest, parce qu’elle avait été créée par Guillaume le Conquérant. Ce roi avait, dit-on, détruit des villes et villages et interdit à la population un immense espace qu’il se réservait pour la chasse; c’est cet espace vide et désert qu’on appelait alors et qu’on appelle encore une forêt, du vieux mot français fors, dehors, dérivé lui-même du latin. Ces terrains abandonnés se couvraient peu à peu de broussailles, puis de grands arbres, et telle est l’origine de la plupart des forêts existantes. La new forest est maintenant très réduite; elle ne couvre plus que 26,000 hectares qui appartiennent à la couronne. D’autres forêts qui n’ont laissé que peu de traces s’étendaient sur d’autres points du comté.

Le comté de Hants est donc une ancienne contrée de forêts et de bruyères ; voilà son caractère principal. Les bruyères nourrissaient une espèce de moutons, petite, mais excellente, connue sous le nom de moutons de Bagshot. Les forêts de chênes, semblables à celle où s’ouvre le roman d’Ivanhoe, nourrissaient à leur tour des troupeaux de pores qui fournissaient un lard estimé; le lard du Hampshire est encore considéré comme le meilleur. Le pays a été modifié par la culture, mais il a beaucoup conservé de son ancien aspect : les beaux arbres y abondent, et on y trouve encore des étendues de bruyères et de bois. La new forest est célèbre par ses sites sauvages. La rente de la terre y descend assez bas : on l’évalue à 45 fr. l’hectare en moyenne; mais cette moyenne est ainsi abaissée par la quantité de terres médiocres qui ne produisent que des bois ou de mauvais pâturages; dans les meilleures, l’agriculture est assez avancée. La population, bien plus nombreuse qu’un pareil sol ne le ferait supposer, s’élève environ à une tête par hectare. Il est vrai que, plus encore que dans le Kent, une partie de sa subsistance lui vient du dehors. Les ports de Southampton et de Portsmouh, , l’un commercial, l’autre militaire, sont les théâtres d’une immense activité. On y apporte de France beaucoup de denrées alimentaires.

Dans les mauvais districts, les fermes sont très vastes : on en trouve qui ont jusqu’à 400, 800, 1,200 hectares; dans le midi du comté, elles ont moins d’étendue, de 50 à 200 hectares environ. Ce sont toujours des moutons qu’on produit à peu près exclusivement dans les fermes à grands parcours; seulement la race a été grandement améliorée, non pour la qualité, mais pour la quantité de la viande. Il en a été de même de la race de pores, qui n’est plus la race grande, agile et forte d’autrefois, mais qui s’engraisse mieux et plus vite.