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triennal. De plus, c’est un pays de petite culture : les fermes sont en moyenne de 25 hectares, et les fermiers, rudes travailleurs qui l’ont presque toute la besogne par eux-mêmes, ne sont pas assez riches pour prêter beaucoup au sol.

Avec les bas prix, ces petits fermiers, si économes et si laborieux qu’ils soient, ne peuvent pas vivre. Il faut donc, là aussi, une révolution ; elle est commencée. Heureusement la propriété est moins divisée que la culture, et la plupart des propriétaires, à défaut de leurs fermiers, peuvent faire des efforts. Lord Londonderry, lord Durham, le duc de Cleveland, rivalisent en quelque sorte de générosité. Une grande partie des bénéfices réalisés dans les houillères passe maintenant en travaux de tout genre pour l’amélioration du sol. De tous côtés, on pose des tuyaux, on construit des étables, on transporte des masses nouvelles d’amendemens et d’engrais ; dans quelques années, la face du pays sera changée. Tout n’est pas d’ailleurs à refaire, et dans quelques parties du comté, dans les terres légères déjà soumises à l’assolement de Norfolk, dans les grasses vallées à herbages, la culture est déjà riche et florissante. Il ne faut pas oublier que la race des bœufs courtes-cornes est sortie d’une des vallées du Durham.

Le petit comté de Westmoreland n’a pas tout à fait 200,000 hectares. C’est, -comme son nom l’indique, Westmoreland, terre des landes de l’ouest, — la région la plus montagneuse, la plus inculte et la moins peuplée d’Angleterre. On n’y trouve qu’un habitant pour 4 hectares ; aussi la rente moyenne descend-elle à 35 francs, ce qui est encore considérable, puisque, les deux tiers à peu près étant sauvages, la rente des terrains cultivés doit être de 100 francs environ. L’agriculture fleurit dans les vallées, notamment dans celles d’Éden au nord et de Kendal au sud. Le Westmoreland est la Suisse de l’Angleterre, le pays des lacs tant célébrés par les poètes. Un chemin de fer mène en quelques heures de Manchester et de Liverpool au bord du lac de Windermere, le premier, le plus grand et le plus gracieux de tous. En sortant du tumulte et de la fumée des districts manufacturiers, on se trouve dans une riante solitude, où tout est calme, frais et pur ; les eaux limpides, l’air vif et le sol vert succèdent aux eaux bourbeuses, à l’air épais et au sol noirci des marécages d’où sort le charbon. Un bateau à vapeur vous promène sur le lac long et étroit qui serpente comme une large rivière au milieu d’un paysage ravissant Le Windermere n’a que quatre lieues de long sur un quart de lieue de large ; c’est comme un diminutif des grands lacs des Alpes. À son extrémité, on débarque près du joli village d’Ambleside, où vous attendent d’élégantes voitures qui conduisent de gorge en gorge et de lac en lac jusqu’à Keswick.