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ses American Antiquities and discoveries in the West [1835), fait arriver dans le Nouveau-Monde des tribus d’Israël, et l’Arsareth mentionna dans le livre d’Esdras est, selon lui, l’Amérique. M. George Jones, dans une Histoire de l’ancienne Amérique publiée en 1843, identifie les Peaux-Rouges aux Tyriens et aux Juifs, et reprend toutes les rêveries des missionnaires espagnols sur l’introduction du christianisme en Amérique par saint Thomas. Ces antiquaires sont encore les plus réservés. Il en est d’autres, comme M. William Pidgeon, qui en ont découvert beaucoup plus long, grâce au dernier des Indiens-Élans [Elks), De-coo-Dah, qui a confié à M. Pidgeon toutes les traditions de sa contrée, et lui a raconté les aventures des Mound-Builders. Une monnaie romaine découverte sur les bords de la rivière d’Espères dans le Missouri, et une monnaie persane trouvée sur les bords de l’Ohio prouvent d’ailleurs d’une manière irréfragable que les Égyptiens sont venus dans le Nouveau-Monde, où ils ont laissé des momies ! Ce sont des antiquaires de cette force qui ont sans doute inspiré à M. Spaulding son étrange roman, mis au jour par J. Smith, et le succès des ouvrages dont je viens de parler explique et justifie celui du Livre de Mormon. L’ancien monde avait sa Bible, pourquoi le nouveau n’aurait-il pas la sienne ? D’ailleurs les Indiens étant définitivement venus de l’Égypte, ils avaient tous les droits à obtenir un second Moïse.

Le choix de la nouvelle patrie adoptée par les Mormons, et dans laquelle leur société a pris un si rapide et si étonnant accroissement, parait être un des élémens principaux de leur prospérité. Le Déséret comprend la vallée du grand Lac-Salé. Cette vallée s’étend, à moitié chemin, entre le vaste territoire du Mississipi et la Californie. L’île occupe une large dépression appelée le Grand-Bassin, qui forme comme une oasis au milieu de l’aride solitude des Montagnes-Rocheuses, il était impossible de mieux tomber, tant pour la sécurité de la communauté naissante que pour l’avenir de ses relations. La vallée du Grand-Bassin n’est dans la dépendance d’aucun autre canton. Nulle rivière ne va porter au dehors le tribut de ses eaux ; la chaîne de montagnes qui l’entoure lui forme un rempart naturel. Tandis qu’aucune végétation ne vient reposer l’œil de l’émigrant qui se rend en Californie après avoir quitté la Blue-River, de magnifiques arbres ombragent la ville des Mormons, et lui ont valu le surnom de Diamant-du-Désert. Ce ne fut que dans l’été de 1847 que les Mormons atteignirent la vallée du grand Lac-Salé, et trois ans après (1850), c’était déjà un pays cultivé, qui fournissait en grande partie à la subsistance de ses habitans. Ce fait montre quelle est la fertilité du sol, et quelque activité, quelque intelligence agricole que l’on prête d’ailleurs aux colons, il faut reconnaître qu’ils ont dû être grandement servis par la libéralité de la nature en ce pays.

Tout donne à penser que la Californie est appelée aux plus belles destinées. La découverte providentielle des gisemens aurifères y a réuni une population nombreuse, et ces aventuriers deviendront la souche d’une nation riche, et puissante. Un sol vierge, un climat tempéré, de vastes cours d’eau, une magnifique position par rapport à l’Océan Pacifique, feront peut-être passer un jour dans ces contrées la prospérité et la civilisation de notre Europe, qui n’occupera plus que le second rang. En même temps que l’état de