Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 3.djvu/621

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

animaux, un shilling pour acheter chacun des deux catalogues, en tout 9 francs que tout visiteur devait payer à la Société. J’ai calculé combien chacun des étrangers venus à Glocester avait dû dépenser pour son voyage, et j’ai trouvé au moins 100 francs par tête ; le lit seul coûtait pour une nuit une demi-guinée ou 13 francs. Je doute qu’en France l’amour de l’agriculture attirât beaucoup de monde dans de pareilles conditions. J’ai ouï dire qu’au dernier concours d’Orléans, dont le gouvernement avait pourtant fait tous les frais, et qui n’était qu’à trente lieues de Paris, il n’y avait pas une bien nombreuse assistance ; à Glocester, plus de 40 mille personnes ont payé à la porte pour entrer. Cet empressement des Anglais est d’autant plus remarquable, que le concours de la Société royale n’est pas le seul ; il n’y a presque pas de comté qui n’ait sa société particulière et ses concours spéciaux, dont le public volontaire paie également la dépense. La chose commence même à être poussée à l’excès, et cette succession si rapide de meetings et d’exhibitions impose aux cultivateurs qui veulent se tenir au courant un véritable sacrifice de temps et d’argent.

L’exhibition de la Société royale était divisée en deux parties, les machines et les animaux ; les produits agricoles n’y sont pas appelés, je ne sais pourquoi. Il me paraîtrait utile de comparer aussi les blés, les orges, les avoines, les racines, les fromages, les beurres, etc.

Le département des machines, de beaucoup le plus important, couvrait dix acres anglais ou quatre hectares de terrain. En 1839, à la première exposition de la Société royale, il y avait en tout 23 instrumens, et dans ce temps-là les gentlemen farmers protestaient en toute occasion qu’ils ne s’étaient jamais servis et ne se serviraient jamais que des instrumens connus de leurs pères. Cette année, plus de 2 mille machines, envoyées par 121 exposans, prenaient part au concours. Sans doute plusieurs sont encore à l’essai, et ce sont les plus dispendieuses ; mais le plus grand nombre est devenu d’un usage courant, et d’un bout à l’autre de la Grande-Bretagne les fabricans en vendent des quantités considérables. Les prix des plus recherchées baissent d’année en année, ce qui indique un débit croissant ; ainsi, le célèbre rouleau de Crosskill, qui se vendait dans l’origine 20 livres, se donne aujourd’hui pour 14, avec six mois de crédit ou 5 pour 100 d’escompte, et quand on en prend trois à la fois, l’escompte est de 15 pour 100. 14 livres sterling ou 350 fr., c’est encore beaucoup pour un rouleau, sans compter les frais de port qui peuvent être énormes, car c’est une lourde machine qui ne peut être traînée, que par trois chevaux ; il n’en est pas moins remarquable, pour quiconque la connaît, qu’on puisse la donner pour ce prix-là, surtout avec la hausse du fer.

On retrouvait à Glocester tous les instrumens dont l’expérience de ces dernières années a éprouvé l’utilité, et qui font partie aujourd’hui de toute ferme bien tenue : tels sont, avec le rouleau brise-mottes de Crosskill, la herse de Norvège du même fabricant, qui coûte le même prix que son rouleau ; les semoirs de Garrett, qui se vendent jusqu’à 1,000 et 1,200 fr. ; la houe à cheval du même, du prix de 400 fr. ; la charrue de Ransome, du prix de 100 fr., le scarificateur de Biddell, de 500 fr. ; celui de Bentall, qui n’en coule que 170 ; les machines à fabriquer les tuyaux de drainage, les hache-pailles, les coupe-racines, etc., etc. L’attention se détournait de ces excellens instrumens, maintenant