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honorée en Hollande, — le comte Van der Duyn et le baron de Capellen[1].

Les noms du comte Van der Duyn et du baron de Capellen ne sont pas tout à fait nouveaux en France. Le premier y est connu comme ayant eu, avec M. de Hogendorp en 1813, la plus grande part au mouvement populaire qui releva l’indépendance de la Hollande, l’autre comme ayant gouverné les colonies néerlandaises, et à ce titre il a déjà été cité à plusieurs reprises dans les travaux aussi curieux qu’instructifs que la Revue a publiés sur ces colonies. Il n’est cependant pas inutile d’entrer dans quelques détails plus particuliers sur ces deux personnages, dont le caractère et la vie se distinguent par des traits singuliers, et qui, unis ensemble par une longue amitié et par une étroite alliance de famille, offraient cependant entre eux de profonds contrastes. Avant de les accepter pour témoins, il faut savoir et la position qu’ils occupaient et la confiance qu’ils méritent.

Le comte Van der Duyn, né en 1771 d’une famille noble, eut l’avantage, dont il se félicite avec raison, de recevoir une éducation publique. Il fut ainsi, comme il le dit, soustrait, dès sa première jeunesse, « au luxe et aux heures irrégulières de parens vivant dans le grand monde, surtout à la négligence, à l’instruction et aux idées souvent étroites d’un gouverneur suisse, alors fort à la mode. » Il contracta au collège l’amour de l’étude, la passion de la lecture, les idées d’égalité et l’absence de toute vanité de caste. Après qu’il eut passé deux années sous les drapeaux, sa famille, dans des vues d’ambition, le retira du service pour le faire entrer à l’université de Leyde. À la fin de 1791, il prit ses degrés, et après le mariage du prince héréditaire d’Orange, fils du stathouder Guillaume V, il entra comme gentilhomme de la chambre dans la maison du jeune prince. La mort d’un oncle lui ouvrit une place dans le corps équestre de la province de Hollande, dont il se trouva le membre le plus jeune, et a la fin de 1794, quand les armées françaises s’avançaient, il y votait pour qu’à défaut de secours prompts et efficaces de l’Angleterre, on traitât avec la France. Le rejet de cette proposition par une immense majorité fut presque immédiatement suivi de l’entrée des Français et de la révolution qui érigeait la république batave. M. Van der Duyn se retira alors des affaires, et vécut pendant huit ans, avec ses livres, à la campagne, où son séjour n’était interrompu que par

  1. Ces souvenirs ont été recueillis et mis en ordre par M. le baron S. de Grovestins, ancien secrétaire du cabinet et plus tard chambellan de Guillaume Ier, roi de Hollande, sous ce titre : Notice et Souvenirs du conte Van der Duyn et du baron de Capellen ; ils forment un volume qui n’a pas été mis en vente, qu’on n’a tiré qu’à un petit nombre d’exemplaires pour des parens et quelques amis.