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VOYAGES


ET


PENSEES MILITAIRES.




Sous l’impression d’une lutte qui durait encore, j’écrivais, il y a quelques années, des pages qui ont élu accueillies avec bonté[1]. C’était le plus sinistre épisode de nos guerres civiles que je cherchais à peindre, et presqu’à mon insu, entre les fantômes sanglans qu’évoquait mon souvenir, je ne m’attachais qu’à une seule image : j’essayais de montrer dans sa force que rien n’abat, dans son éclat que rien n’altère, le génie guerrier de notre pays. Je venais d’assister à un des plus étranges miracles de cette invincible puissance. Une troupe formée d’élémens tumultueux que le souffle des révolutions avait au hasard amoncelés était devenue en quelques jours l’armée des lois, de l’ordre, de la société. L’esprit militaire avait changé en ardens et ingénieux ennemis de la révolte les fils les plus turbulens de l’insurrection. Le corps dont j’ai raconté l’histoire si courte et si remplie a maintenant cessé d’exister ; mais l’armée a reçu dans ses rangs plus d’un de ceux qui en faisaient partie : c’est aujourd’hui du sein de cette grande famille que je poursuis des tableaux devenus également chers à mes yeux et à mon cœur.

Je sais qu’on ne me demandera point la perfection de la peinture. Je n’ai fait et n’ai pu faire que des ébauches où j’ai essayé seulement de fixer un peu de la vie, tantôt imposante, tantôt passionnée, dont

  1. Voyez la Garde mobile, souvenirs de la révolution de février, dans la Revue du 1er novembre 1849.