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à trois ans de la durée septennale des parlemens. La proposition était populaire, Bolingbroke, qui dirigeait secrètement l’attaque, l’avait commencée dans la presse. Une forte discussion s’éleva, dans laquelle Wyndham, avec une véritable éloquence, lança contre Walpole une invective mémorable. Par une figure de rhétorique connue, il supposa un roi dominé par un ministre et une chambre qu’il peignait des plus noires couleurs, et il terminait ainsi : « C’est, je l’espère, ce qui ne doit jamais exister ; mais enfin, comme il est possible que telle chose existe, plus grande malédiction peut-elle tomber sur une nation qu’un tel roi sur le trône, uniquement conseillé par un tel ministre, et ce ministre soutenu par un tel parlement ? » Ce mouvement produisit un grand effet ; Walpole fut ému. — Il a entendu le langage de la postérité, s’écriait déjà Bolingbroke ; mais Walpole, reprenant une énergique offensive, passant par-dessus son adversaire apparent, s’attaqua à son invisible ennemi, et supposant à son tour un anti-ministre ingrat, factieux et traître, il dénonça Bolingbroke sans le nommer, et le menaça du ton d’un pouvoir tout prêt à se venger. 247 voix contre 184 sauvèrent le ministre. C’étaient là de fortes minorités auxquelles il n’était pas habitué. L’opinion du dehors semblait agitée, et le terme légal de la durée du parlement était venu. On pouvait espérer ou craindre de la prochaine dissolution un changement de majorité ; la presse, souvent dupe du bruit qu’elle se fait à elle-même, commençait à prédire le triomphe de l’opposition. Cet espoir fut déçu encore une fois : l’élection générale donna à la cour une majorité un peu réduite, mais assurée, et à l’ouverture de la session (janvier 1735), la première division déclara la victoire du gouvernement.


CHARLES DE REMUSAT.