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DES


RELIGIONS DE L’ANTIQUITÉ


ET


DE LEURS DERNIERS HISTORIENS.




Religions de l’antiquité, considérées principalement dans leurs formes symboliques et mythologiques, du docteur Frédéric Creuzer, ouvrage traduit et refondu par J.-D. Guigniaut ; 10 volumes in-8o, Paris, 1825-1851.




La critique est née de nos jours, et il n’appartenait qu’à la critique la plus délicate d’apercevoir, en dehors de toute idée de dogmatisme comme de polémique, la véritable importance de l’étude des religions. Si l’homme vaut quelque chose, c’est parce que, s’élevant au-dessus de la vulgarité de la vie, il atteint par ses facultés morales et intellectuelles un monde d’intuitions supérieures et de jouissances désintéressées, la religion, c’est la part de l’idéal dans la vie, humaine ; elle est toute en ce mot : L’homme ne vit pas seulement de pain. Il est, je le sais, une autre puissance qui prétend, elle aussi, résumer la vie spirituelle de l’humanité, et le moment serait mal choisi pour en médire ; mais ce n’est pas nier la philosophie, c’est lui rendre sa véritable place, la seule où elle soit grande, forte, inattaquable, que de dire qu’elle n’est pas faite pour le grand nombre. Sublime si on la considère dans le cénacle, des sages dont elle a été l’aliment et l’entretien, la philosophie n’est qu’un fait imperceptible, si on l’envisage dans l’histoire de l’humanité. On compterait les âmes qu’elle a ennoblies, ou ferait en quatre pages l’histoire de la petite aristocratie qui s’est groupée sous ce signe : le reste, livré au torrent de ses rêves, de ses terreurs, de ses enchantemens, a roulé pêle-mêle dans les hasardeuses vallées de l’instinct et du délire, ne cherchant sa raison d’agir et de croire que dans les éblouissemens de son cerveau et les palpitations de son cœur.

La religion d’un peuple, étant l’expression la plus complète de son individualité,