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PROSPER.

Par une belle matinée du mois de mai 1827, une fillette d’une dizaine d’années s’avançait d’un pas résolu dans le sentier ombi d’aubépines et de chèvrefeuilles sauvages qui conduit au hameau

principal de la commune de ***, en Vendée. Le petit paquet que la jeune enfant portai ! sous [e bras, ses vêtemens soigneusement arrangés, quoique très rustiques, sa coiffe bien blanche el ses souliers poudreux, montraient qu’elle avait échangé pour ce jour-là les fatigues des travaux des champs contre celles d’une Longue course à pied. Son pas régulier, sa démarche alerte, prouvaient aussi qu’elle était active, autant par habitude que par nature : elle regardait autour d’elle d’un petit air inquisiteur plutôt que curieux, comme si, ayant déjà des opinions fort arrêtées en agriculture, elle comparait tout bas ce qu’elle voyait dans ce nouveau pays avec ce qu’elle avait u dans un autre. De temps en temps, elle s’arrêtait bien pour cueillir quelques-unes des jaunes primevères qui tapissaient les fossés, ou pour arracher aux branches neigeuses de l’aubépine une poignée de Heurs blanches ; mais ces distractions étaient raies, et elle semblait suivre sa route avec une détermination arrêtée que ni les papillons voltigeant sur les haies fleuries, ni les oiseaux gazouillant parmi les branches, ni’le soleil brillant dans le ruisseau, ni l’ombre fraîche et déjà désirable des saules, ni la lassitude de ses petites jambes et les entraîne mens de sa jeune tête ne pouvaient troubler. Cependant la fillette finit par arriver à une espèce de carrefour d’où partaient trois sentiers conduisant l’un à droite, l’autre à gauche, tandis que le troisième continuait à côtoyer le ruisseau. La petite voyageuse sembla