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trouvait en quelque sorte au centre de l’agitation protestante. Le 15 avril, il donnait audience à une commission chargée de lui présenter une pétition dirigée contre l’organisation catholique ; et revêtue de nombreuses signatures. Cette députation était accueillie avec une bienveillance particulière par le roi, qui déclarait qu’il sentait toute l’importance d’une telle démarche. D’après certaines versions, Guillaume III aurait même ajouté « qu’il se croyait lié contre son gré par la constitution, et qu’en recevant une plainte sur ce qui était arrivé en vertu de cette constitution, il considérait comme plus resserré encore le lien qui unit la maison d’Orange et la Néerlande. » C’était cette fois au cabinet de La Haye à s’émouvoir à son tour. Aussi adressait-il immédiatement une lettre au roi pour lui demander si tel était réellement le sens de ses paroles, et, dans le cas affirmatif, pour lui offrir la démission collective du ministère. Cette démission était en effet acceptée. C’est ainsi qu’a fini le cabinet de M. Thorhecke, qui était au pouvoir depuis 1849. Quand nous disions que la démission du cabinet était acceptée, elle ne l’a été en réalité que pour MM. Thorhecke, Van Zuylen van Nyevelt, Van Bosse, Strens, lesquels ont été remplacés par MM. Van Reenen à l’intérieur, Van Hall aux affaires étrangères, Van Doorn, l’auteur de l’ordre du jour de la seconde chambre, aux finances, Donker-Curtius à la justice. Les autres membres de l’ancien cabinet ont conservé provisoirement leurs portefeuilles et paraissent devoir rester dans le nouveau ministère. Peu de jours après, Les états-généraux étaient suspendus, et en ce moment même, comme il était facile de le pressentir, la seconde chambre vient d’être dissoute. Les élections sont fixées au 17 mai, et la réunion de la nouvelle chambre doit avoir lieu le 14 juin. Ces divers actes sont accompagnés d’un manifeste politique adressé à la nation sous la forme d’un rapport au roi.

Maintenant, en consultant la situation de la Hollande et ce manifeste lui-même, quel est le sens de ce changement ? Au fond, peut-être le roi Guillaume III n’a-t-il fait que saisir une occasion de secouer la direction de M. Thorbecke. On pourrait le conclure d’un passage du programme du nouveau cabinet, où il est dit que l’article de la loi fondamentale qui attribue au roi le pouvoir exécutif ne doit point être une lettre morte, et que « au roi seul appartient le droit de gouverner » Mais dans l’état actuel de la Hollande, il y a évidemment une autre signification à chercher dans cette crise. Comment le nouveau ministère considérera-t-il l’acte même du rétablissement de la hiérarchie catholique en Hollande. L’acceptera-t-il purement et simplement ? Continuera-t-il les nominations aux nouveaux évêchés ? Ouvrira-t-il des négociations nouvelles ? Il serait difficile de rien pressentir sur ces divers points. Le résultat des élections peut singulièrement modifier les résolutions du gouvernement. Ce qu’il y a de certain, c’est que le nouveau cabinet se prononce dès ce moment pour le maintien de la constitution, en ce qui touche particulièrement la liberté religieuse. Or cela implique évidemment, en principe, la reconnaissance du droit du saint-siège. même en réservant, comme le fait le programme, le droit de surveillance de l’état. Sur d’autres points, la politique du nouveau ministère diffère d’une manière assez sensible de celle de l’ancien cabinet, notamment sur quelques lois organiques, sur la centralisation, sur les règlemens de l’administration des pauvres. En d’autres termes,