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elle est réalisable sous tous les climats, et pourrait être transportée dans les pays chauds, où elle produirait bien d’autres merveilles. Elle paraît d’une application plus générale encore que le drainage, et on ne saurait trop appeler sur elle l’attention des cultivateurs français.

Grâce à ce surcroît d’engrais, fortifié encore par tous les engrais artificiels que l’imagination peut découvrir, le rendement des céréales peut s’élever dans la même proportion que les produits animaux. Le rendement moyen est porté, dans les terres cultivées par les nouvelles méthodes, à 40 hectolitres de froment, 50 d’orge et 60 d’avoine par hectare ; comme en même temps l’étendue emblavée est fort accrue, le produit total est plus que doublé. Ce ne sont pas là des spéculations et des hypothèses, ce sont des faits réalisés sur beaucoup de points du royaume-uni. Dans chaque comté, il y a au moins une ferme où quelque riche propriétaire ne craint pas de faire ces essais ; la masse des cultivateurs observe, étudie, et, dans la mesure de ses ressources, imite ce qui a réussi.

L’ensemble du système ne peut être avantageusement mis en pratique que dans les pays les plus favorables à la production des céréales, c’est-à-dire dans la région du sud-est, la plus travaillée de toutes par la crise. Dans l’ouest et le nord, on le simplifie généralement par la suppression à peu près complète des céréales. La division du travail fait ainsi un nouveau pas : la culture des céréales s’étend dans les terres qui s’y prêtent le plus ; elle se resserre dans celles qui s’y prêtent le moins. Il ne paraît pas que dans l’ensemble la proportion des terres emblavées doive changer sensiblement. Les autres parties du système font des progrès dans les régions où l’on se borne de plus en plus à nourrir du bétail, et on en obtient des résultats sinon plus beaux, au moins plus assurés. Je n’en veux citer qu’un exemple, la ferme de Cunning-Park, dans le comté d’Ayr. Cette ferme, qui n’a que 20 hectares de superficie, était il y a cinq ans dans les conditions moyennes de l’Angleterre : la rente n’y dépassait pas 75 fr. par hectare et le produit brut 250 fr. ; aujourd’hui le produit brut atteint 1,500 fr. par hectare, et le produit net est d’au moins 500. On ne fait pourtant que du lait et du beurre à Cunning-Park ; mais, grâce aux nouveaux procédés, on y entretient quarante-huit vaches au lieu de dix, et chacune de ces vaches est beaucoup plus productive.

Tels sont les traits généraux de la révolution agricole actuelle, ce qu’on appelle le high farming, la haute culture. Il est impossible d’entrer ici dans plus de détails. Je veux pourtant signaler encore un point qui peut servir à caractériser de plus en plus le système : la guerre faite aux haies et au gibier. Quand le principe de la culture anglaise