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Suisse, on le sait, se trouve placée depuis quelque temps sous l’empire de difficultés assez diverses, les unes extérieures, d’autres intérieures. C’est ainsi que les négociations depuis quelques mois poursuivies entre l’Autriche et le gouvernement fédéral, tant sur la question des réfugiés qu’au sujet des couvens du Tessin, ont fini par aboutir à une sorte de rupture diplomatique. Le chargé d’affaires autrichien, le comte Karnicki a quitté Berne, et l’ordre de quitter Vienne avait été donné au chargé d’affaires suisse par son gouvernement ; mais cet ordre a été suspendu sur des explications nouvelles. Il n’est donc point probable aujourd’hui que cette interruption de rapports diplomatiques aille au-delà d’une simple mesure du moment et entraîne aucune conséquence plus grave. Des négociations nouvelles seront renouées sans doute soit directement, soit par l’intervention médiatrice d’un gouvernement ami. Il s’est un moment accrédité, à ce qu’il semble, que la France appuyait complètement les réclamations de l’Autriche auprès de la Suisse. Ce n’est point là sans doute la portée des communications qui ont pu être faites par le gouvernement français ; mais il a pu et dû engager le gouvernement de la confédération à mettre tous ses efforts et sa modération à l’arrangement d’un différend dont la Suisse, à tout prendre, est la première à souffrir. Une loi nouvelle, récemment votée par le grand conseil du Tessin sur les réfugiés, peut contribuer à amener une conciliation définitive. D’un autre côté, on n’a point oublié les tristes violences commises dans le canton de Fribourg à la suite de la dernière tentative d’insurrection et à l’occasion des élections de Bulle. Des pétitions nombreuses ont été adressées au conseil fédéral ; le gouvernement du canton de Berne s’est plaint lui-même assez vivement des étranges procédés du gouvernement de Fribourg. Il en est résulté que le conseil fédéral a annulé l’emprunt forcé qui avait été décrété par les autorités fribourgeoises et dessaisi les conseils de guerre des affaires qui leur avaient été déférées. Les individus arrêtés pour faits d’insurrection comparaîtront ainsi devant les assises. Comme on voit, c’est un premier acte de protection des autorités fédérales à l’égard des populations fribourgeoises, qui ont eu plus d’une fois à souffrir du despotisme révolutionnaire de leur gouvernement.

Si la Suisse a eu dans ces derniers temps quelques démêlés avec l’Autriche, le Piémont a eu aussi, on ne l’a point oublié, ses difficultés, soulevées par le décret de confiscation dont le gouvernement autrichien a frappé les biens des émigrés lombards. Ce différend n’est point encore terminé ; Les chambres piémontaises ont eu à voter une allocation en faveur des émigrés naturalisés sardes, et elles ont accompli cet acte, il y a quelques jours déjà, comme elles devaient le faire, sans commentaires injurieux pour l’Autriche et de nature à envenimer cette difficulté. Au milieu du cours régulier de sa vie politique, du reste, le Piémont vient de faire une perte considérable par la mort du comte César Balbo, l’un de ses plus éminens hommes d’état, l’un de ceux qui avaient le plus contribué à la fondation du régime constitutionnel à Turin. Le comte Balbo, après avoir été auditeur au conseil d’état sous l’empire, après avoir servi dans l’armée lors de la restauration de la maison de Savoie, avait pris la plume de l’écrivain : il avait écrit une Vie du Dante ; mais l’ouvrage qui avait le plus fixé sur lui l’attention et qui avait popularisé son nom,