Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 1.djvu/99

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en 1773, un an après la dernière lettre de Junius ; la dépense totale, en y comprenant bien des faux-frais, ne s’élevait pas tout à fait à 20,000 francs par an, dont 2,500 pour frais de traduction des nouvelles étrangères, 350 francs d’abonnemens aux journaux étrangers, et 5 à 600 francs d’abonnemens aux journaux anglais. Cependant le Public Advertiser était un journal bien fait pour le temps et en grande réputation. Cinquante ans plus tard, en 1821, les seuls frais d’impression et de tirage du Chronicle montaient à 1,500 francs par semaine, c’est-à-dire au quadruple des dépenses de toute sorte du Public Advertiser de 1773. A la même époque, les dépenses annuelles d’une feuille du soir étaient de 150,000 francs; celles d’une feuille du matin, même avec la plus stricte économie, ne pouvaient se réduire au-dessous de 225,000 francs, et un journal de premier ordre, désireux de conquérir ou de garder la faveur publique, devait compter sur une dépense de 350,000. Les déboursés pour les nouvelles extérieures se réduisaient pourtant alors à un abonnement de 3,000 francs, payé aux employés de la poste, qui recevaient en avance les feuilles étrangères, et en fournissaient à chaque journal l’analyse et des extraits tout traduits. Tous ces chiffres sont aujourd’hui de beaucoup dépassés. Un journal du matin emploie maintenant un premier et un second prote, un metteur en pages spécial pour les annonces, trois premiers et trois seconds correcteurs, de 45 à 50 compositeurs en titre (le Times en a 110) et 8 ou 10 suppléans, un mécanicien en chef, un aide-mécanicien, 15 ou 18 personnes pour le service de la machine à vapeur et des presses. La composition, l’impression, le tirage, en un mot la préparation matérielle du journal, reviennent en moyenne à 5,000 francs par semaine, c’est-à-dire à plus de 250,000 francs par an.

Nous devons ranger au nombre des dépenses éventuelles dont il n’est pas possible d’indiquer le chiffre approximatif l’acquisition des publications officielles et les abonnemens aux feuilles de l’étranger, des colonies et de la province. M. Hunt évalue à cent cinquante le nombre des feuilles qu’un journal est obligé de recevoir, et comme nous pourrions citer tel journal français qui en reçoit trois ou quatre fois autant, ce chiffre est loin d’être exagéré. Les frais de poste pour les lettres et les missives des correspondans, les dépêches télégraphiques, s’élèvent chaque mois à une somme importante. Souvent il est nécessaire d’employer un courrier pour devancer la poste ou pour l’atteindre. Un rédacteur du Times, en février 1848, a traversé le détroit dans une barque non pontée, pour porter plus tôt à Londres la nouvelle de la révolution accomplie à Paris. Lorsqu’une réunion importante a lieu en province, lorsqu’un personnage politique de premier ordre doit prendre la parole, on est obligé de recourir à un train spécial. Lors de l’élection de M. Hudson à Sunderland, le rédacteur de l’un des journaux de Londres traversa deux fois l’Angleterre en quinze heures, pour aller entendre et sténographier le discours du roi des chemins de fer. La dépense d’un train spécial, quand elle doit être supportée par un seul journal, s’élève à 1,200 francs. Ce sont là de lourdes charges, et nous n’avons encore rien dit du personnel de la rédaction.

A la tête de la rédaction est l’éditeur ou rédacteur en chef, qui est responsable vis-à-vis de la loi de tout ce qui s’imprime, qui représente le journal dans ses relations avec les hommes politiques et avec le public, et qui seul est