Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 1.djvu/921

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

méthodes. Ceux de nos départemens qui ressemblent le plus à l’Angleterre pour la nature et la proportion des cultures sont encore ceux où l’on arrive en somme aux meilleurs résultats, et s’ils restent sur quelques points au-dessous de la moyenne anglaise, c’est que la proportion des cultures épuisantes y est encore plus forte, malgré les progrès faits depuis cinquante ans par les cultures améliorantes.


II

Essayons maintenant d’évaluer la production totale des deux agricultures. Cette évaluation est fort difficile, surtout quand il s’agit d’une comparaison.

Les statistiques les mieux faites et les plus officielles contiennent des doubles emplois. Ainsi, dans la statistique de la France, le produit des animaux figure trois fois : d’abord comme revenu des prés et pâturages, ensuite comme revenu des animaux vivans, enfin comme revenu des animaux abattus. Ces trois n’en forment qu’un : c’est le revenu des animaux abattus qu’il faut prendre, en y ajoutant le produit du laitage pour les vaches, celui de la laine pour les moutons, et le prix des chevaux vendus en dehors de la ferme pour des usages non agricoles. Tout le reste n’est qu’un série de moyens de production qui s’enchaînent pour arriver au produit réel, c’est-à-dire à ce qui sert à la consommation humaine, soit dans la ferme elle-même, soit en dehors. Ainsi encore il n’est pas rationnel de porter en compte la quantité qui sert à renouveler les semences ; les semences ne sont pas un produit, c’est un capital ; la terre ne les rend qu’après les avoir reçues. Ainsi enfin il est impossible de compter, comme le font quelques statistiques, la valeur des peilles et fumiers ; les fumiers sont bien évidemment, sauf une exception importante dont je parlerai plus bas, un moyen de production, et, quant aux pailles, elles ne constituent un produit qu’autant qu’elles servent hors de la ferme, par exemple à nourrir les chevaux employés à d’autres usages.

Tout ce qui se consomme dans la ferme pour obtenir la production, comme la nourriture des animaux de travail et même des animaux en général, les litières, les fumiers, les semences, doit figurer dans les moyens de production et non dans les produits. Il n’y a de véritables produits que ce qui peut être vendu ou donné en salaires. Sous ce rapport, les statistiques anglaises sont beaucoup mieux faites que les nôtres ; les notions économiques étant plus répandues en Angleterre que chez nous, on y sépare nettement ce qui doit être séparé, et les produits réels, les denrées exportables, sont comptés à part des moyens de production. Nous devons d’autant mieux faire de même que, les moyens de production étant beaucoup plus multipliés chez nos voisins que chez nous, la comparaison serait encore