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très curieux si c’était vrai, mais ce que je n’hésite pas à déclarer impossible. Malheureusement, dans ce muséum se voit aussi une exhibition grotesque et parfaitement ridicule. C’est un squelette auquel on fait faire des contorsions ; un lion empaillé que l’on tire par des ficelles hors de sa grotte, tandis qu’un homme caché pousse des hurlemens ; le chien Cerbère qui aboie ; un serpent empaillé qui paraît ramper, et autres momeries bonnes à faire rire les matelots et pleurer les enfans. Eh bien ! ce fut à arranger tout ce spectacle de la foire que dut employer son talent naissant le jeune Powell. Heureusement, dans cette ville industrielle se trouvait un riche particulier, nommé M. Longworth. Celui-ci comprit que ce talent pouvait être bon à autre chose. Un citoyen fit encore cette fois ce que font en Europe les gouvernemens : il envoya à ses frais M. Powell étudier à Rome pendant plusieurs années. Ce même M. Longworth a donné le terrain sur lequel un observatoire a été bâti, comme on dit ici, par le peuple, c’est-à-dire par les souscriptions volontaires des citoyens. Il y a aussi une société astronomique à Cincinnati. La composition de cette société est curieuse : on y compte 25 médecins, 33 avocats, 39 épiciers en gros, 15 épiciers en détail, 5 ministres, 16 marchands de porcs, 23 charpentiers et menuisiers. Évidemment les membres de cette société ne feront pas de grandes découvertes astronomiques, mais ils contribuent de leur bourse à l’étude de l’astronomie. Le docteur Locke, de Cincinnati, a contribué plus directement à l’avancement de la science par son horloge électrique, qui, combinée avec le télégraphe électrique, a fourni un moyen plus parfait de déterminer les longitudes, et à propos de laquelle le célèbre directeur de l’observatoire de Washington, M. Maury, a pu dire dans son rapport officiel : « Ce problème, qui avait tourmenté les astronomes et les navigateurs durant des siècles, a été réduit pratiquement, par la sagacité américaine, à la forme et à la méthode la plus simple et la plus exacte. Maintenant, grâce à ce procédé, les longitudes peuvent être déterminées en une nuit avec beaucoup plus d’exactitude qu’elles n’auraient pu l’être par des années d’observation d’après toutes les méthodes employées jusqu’ici. »

Je m’informe des moyens à prendre pour voir les antiquités de la vallée de l’Ohio. On m’assure que dans la petite ville de Chilicothe je trouverai M. Davies, qui a publié un ouvrage important sur ce sujet. J’hésite à faire cette course, qui me jette hors de la ligne des chemins de fer ; mais, me sentant un peu mieux, je me décide à m’arrêter à Columbus, chef-lieu politique de l’état, et à me rendre de là comme je pourrai à Chilicothe.