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sénatus-- qui a modifié la constitution. D’après les changemens apportés dans la loi fondamentale, on a vu déjà quelles prérogatives, sinon nouvelles peut-être, du moins plus nettement accentuées, sont conférées à l’autorité exécutive. Finances, exécution des travaux publics, répartition des crédits votés par le corps législatif pour chaque ministère, traités diplomatiques et commerciaux, fixation des tarifs de douane, — le pouvoir de l’empereur s’étend à ces diverses matières qui résument elles-mêmes les plus grands intérêts du pays. Quelles modifications subit le pouvoir législatif d’après le dernier décret ? Ce ne sont, à vrai dire, que des modifications de détail, dont quelques-unes semblent avoir pour but de pallier des inconvéniens qui, au point de vue même du mécanisme de la constitution du 13 janvier 1852, s’étaient fait sentir dans la session passée. D’après l’une de ces modifications, la présidence des bureaux est à l’élection, au lieu d’être dévolue au hasard de l’âge. En cas de dissentiment entre le conseil d’état et le corps législatif sur un amendement proposé à une loi, cette dernière assemblée peut déléguer trois de ses membres pour discuter la proposition avec les membres du conseil d’état. D’un autre côté, le récent décret affecte une dotation fixe aux sénateurs et une indemnité aux membres du corps législatif pour le temps des sessions. Enfin le nouveau règlement crée une distinction entre le procès-verbal des séances législatives, qui ne fait que résumer les opérations et les votes de l’assemblée, et le compte-rendu destiné à la presse, lequel continue à reproduire nominativement l’analyse des opinions et des discours de chaque orateur. Ce compte-rendu est soumis à la surveillance et à l’approbation d’une commission formée du président du corps législatif et des présidens de chaque bureau. Comme on voit, les précautions ne manquent pas dans ce prudent mécanisme, pour tracer le domaine de l’action du corps législatif et des journaux. Sur un autre point d’ailleurs, la presse vient de trouver quelque adoucissement dans un décret nouveau. Jusqu’ici, toute amende résultant d’une condamnation essuyée par un journal devait être comptée dans le délai de trois jours au trésor, à qui elle restait dès ce moment acquise, — de telle sorte que, si peu après le chef de l’état venait à exercer son droit de grâce, cette mesure ne pouvait avoir d’effet pour le journal quant à l’amende payée par lui. Maintenant cette amende devra rester déposée à la caisse des consignations pendant trois mois, et pourra être restituée au journal en cas d’exercice du droit de grâce dans cet intervalle. C’est un adoucissement dans le régime matériel de la presse, qui n’a plus trop de tous ses moyens pour mener la laborieuse existence que les événemens lui ont faite.

De toutes les élaborations successives par lesquelles la législation politique de la France passe, on le voit, le pouvoir sort toujours entier, souverain, affranchi de toute sujétion et de tout obstacle. Ce ne sont point les prérogatives qui lui manquent pour imprimer un mouvement fécond aux intérêts généraux du pays. Dans l’ordre moral comme dans l’ordre matériel, dans l’instruction publique comme dans les finances, dans les travaux publics comme dans l’industrie, le champ est vaste, à la condition de marcher avec prudence. Pour ne parler que du commerce, une des plus grandes questions, dont nous avons déjà dit quelques mots, c’est celle des paquebots transatlantiques. Comme toute affaire sérieuse, cette question continue à être l’objet