Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 1.djvu/299

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J’ai été au sénat assister à la réception du président des États-Unis par le gouverneur de l’état de Massachusets. Le président est arrivé suivi de trois de ses ministres, parmi lesquels était M. Webster, le lion du jour et candidat lui-même à la présidence pour l’année prochaine. Le gouverneur de cet état est fils d’un petit fermier : entré au service d’un homme de loi, il passait ses soirées à s’instruire dans les écoles du soir ; il a fondé un athénée dans sa petite ville, y a fait des cours, et est devenu un des chefs du parti démocrate dans son état. Le président a été, me dit-on, charpentier. M. Webster a eu une jeunesse laborieuse. Ces trois hommes ont des manières parfaitement convenables à leur situation actuelle. Tout s’est passé simplement et dignement. Quand le président est entré, on s’est levé. Le président et le gouverneur se sont salués. Le gouverneur a adressé au président un discours commençant par la formule d’usage : Please your excellency (plaise à votre excellence). Le président a répondu par des éloges de la population de Boston, de ses marchands princes, de ses ouvriers nobles de par la nature ; le gouverneur, bien qu’il soit du parti opposé à celui de M. Webster, a introduit avec assez d’à-propos un éloge de celui-ci dans la réponse qu’il adressait au président. M. Webster a pris la parole au milieu des applaudissemens ; mais, de l’aveu général, le grand orateur a été aujourd’hui mal inspiré. Il a flatté un peu grossièrement le peuple américain dans un discours qu’autour de moi on trouvait de mauvais goût. Un autre ministre, qui est Virginien, a eu beaucoup de succès, « Un Virginien, a-t-il dit, ne se sent pas étranger à Boston, » et, réunissant le midi et le nord dans ses hommages : « si vous avez votre Bunker-hill, a-t-il dit, nous avons notre Yorktown. Si vous avez votre Daniel Webster, nous avons notre Washington, qui vous appartient aussi, our and your Washington. » Comme le nord et le sud sont toujours disposés à se quereller, la sagesse, des hommes d’état de tous les partis s’applique à ranimer les sentimens d’union si nécessaires au maintien de la fédération américaine.

Voici un trait de mœurs assez curieux. J’ai appris que le speaker de l’assemblée représentative de l’état s’est si bien conduit dans des momens difficiles, que les différens partis se sont réunis pour lui témoigner leur reconnaissance en lui donnant…… une montre.


18 septembre.

Ce jour est consacré à une promenade dans la rade de Boston. Plusieurs bâtimens à vapeur ont été mis par la ville à la disposition de ses hôtes. Une place m’a été accordée sur celui de ces bâtimens qui porte aussi les députés canadiens venus de Montréal et de Québec pour fraterniser avec les habitans de Boston. Le temps est merveilleusement beau. La ville, entourée presque de tous côtés par la mer