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Le compte des produits du gros bétail dans les deux pays pourrait donc s’établir en gros de la manière suivante, en négligeant de part et d’autre la valeur des issues et celle des fumiers, qui doivent se compenser à peu de chose près, et en évaluant le kilogramme de viande à 1 franc :

FRANCE.


Lait 100 millions.
Viande 400
Travail 200
Total 700 millions.

Soit 70 francs par tête et 14 francs par hectare.

ILES BRITANNIQUES.


Lait 400 millions.
Viande 500
Total 900 millions.

Soit 110 francs par tête et 30 francs par hectare. Dans l’Angleterre proprement dite, ce produit est d’environ 50 francs par hectare.

Ces chiffres se contrôlent par un fait extrêmement simple et facile à constater : c’est le prix moyen des animaux dans les deux pays. En général, le prix courant d’un animal donne une mesure assez exacte du bénéfice que l’acheteur espère en retirer; or, il est constant que la valeur moyenne des bêtes à cornes est en Angleterre fort au-dessus de ce qu’elle est en France. Il n’est même pas nécessaire d’aller en Angleterre pour constater une semblable différence; nous avons en France deux régions, l’une où le gros bétail ne travaille pas, et l’autre où il est soumis au travail. Si nous recherchons la valeur moyenne dans les deux régions, nous voyons qu’elle est dans la première bien au-dessus de ce qu’elle est dans la seconde. Et cependant l’art d’élever des bestiaux pour la boucherie uniquement est encore en France à peu près inconnu. Que serait-ce s’il était parvenu au point où il est aujourd’hui en Angleterre?

Je sais que la substitution des races de laiterie et de boucherie aux races de travail n’est pas toujours possible, je dirai plus tard pourquoi l’agriculture britannique a pu à ce point prendre les devans sur nous. Je ne fais aucun reproche aux portions de notre territoire qui sont cultivées par des bœufs, je ne conseille aucune transformation brusque et irréfléchie; je me borne à constater ce qui est, et je crois avoir démontré que, par le seul fait de l’abandon à peu près complet du travail par les bœufs, le sol britannique, même y compris l’Ecosse